Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Le début et la fin Ven 7 Aoû - 15:25:27
- Tu es parfaite ! Tu as repris du poids ces dernières semaines. Je suis contente.
Le visage de Japhet Cullen entra dans l'encadrement du miroir devant lequel se tenait déjà Toni qui se dévisageait et redécouvrait un visage dont elle avait longtemps oublié les traits. Deux chandeliers éclairaient timidement la pièce vide autour des deux jeunes filles. Le miroir était posé sur un pupitre, contre le mur en pierre d'une des pièces du bureau des élèves.
Toni était assise sur une chaise et Japhet se tenait debout à côté d'elle, penchée au-dessus de son épaule. Cette dernière admirait son travail: un maquillage sophistiqué à peine plus prononcé que d'habitude, des cheveux coupés au carré où brillait une légère poudre scintillante qui provoquait une sorte de halo doré dès que Toni remuait la tête, une robe noire à bretelles, assez courte mais simple… "parfaite" pour Japhet mais Toni n'avait pas encore d'avis bien qu'elle admettait intérieurement que cela faisait un long moment qu'elle n'avait pas eu l'air aussi en forme. En effet, les fraîches rondeurs sur ses joues étaient revenues, ses épaules et ses articulations paraissaient moins saillantes, sa démarche et ses gestes avaient retrouvé leur fluidité et leur assurance.
Toni fit une moue désabusée :
- Pas mal, pas mal… - Pas mal ? Tu rigoles ? Tu apprendrais le bon goût à un troll rien qu'en croisant son chemin. Allez, debout, va-t-en retrouver ton cavalier avant qu'il croise une fille plus souriante que toi. - Hé mais je souris ! s'étrangla Toni poussée dehors par Japhet qui, elle, n'était pas encore prête.
La porte venait de claquer entre les deux filles. Japhet était parvenue à jeter la Gryffondor dehors pour jouir pleinement de son plan de travail esthético-pharaonique.
- Merci Japhet !! cria Toni à travers la porte.
Elle trottina jusqu'au hall après être allée chercher un petit sac baluchon en tissu noir et mauve irisée assorti à sa robe. Elle y fourra un unique objet.
Dans le hall, elle se posta en haut des escaliers qui menaient aux cuisines et attendit… attendit… manquant de patience, elle mit ses mains en porte voix et hurla - avec toute la discrétion et la féminité dont son sexe était naturellement pourvu - du haut de l'escalier :
Un beau couple Serpentard/Poufsouffle, surpris par le cri alors qu'ils s'apprêtaient à monter les marches, frôla la crise cardiaque. Le Serpentard conspua Toni jusqu'à ce que le couple ait disparu dans le parc. Toni les suivi des yeux avec un regard désolé pour la Poufsouffle. La pauvre fille, elle allait passer une soirée horrible avec un horrible râleur visiblement de mauvais poil en cette soirée pourtant géniale.
- Génial, murmura-t-elle heureuse en pointant de nouveau ses yeux vers le bas de l'escalier, enfin, s'il arrive…
Un court instant Toni s'imagina qu'il avait en effet croisé une fille plus souriante que lui et que... Oh, non, non, non... Dans ce cas, elle lui briserait incontestablement chaque os de la main avant de s'en prendre à ses orteils. C'était grâce à lui, à leur amitié, et à tout ce qui était arrivé en France et depuis la France qu'elle allait bien. Maintenant, sans sa dose quotidienne de Jörgen, elle ne tiendrait pas. C'avait été dur de "tout" admettre. Il restait encore du travail et des choses à vivre ensemble. Surtout que ces trois jours de fêtes précédaient la terrible et longue séparation des vacances d'été. "Alors O'Brian, il est hors de question que tu me laisses tomber comme une citrouille pourrie un soir de fête !"
Là, le visage de Toni déformé par une grimace grotesque lui donnait l'air d'une satyre. Comme une première année de Poufsouffle n'osait pas monter l'escalier de peur d'en venir à croiser le chemin de Toni, la Gryffondor sourit avec gêne, reprit un visage normal et surtout, elle s'écarta de ce maudit escalier en soupirant... Le pire était que Jörgen n'était pas encore en retard. Il ne le serait que dans dix minutes. Toni était impatiente.
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Lun 10 Aoû - 9:31:30
Les yeux cernés de James parvenaient encore à mimer l'amusement. Et à Jörgen, il restait une bonne part de compassion. Assez en tout cas, pour sourire alors que son frère tentait une boutade.
"Jörg, mon cher, il me semble avoir entendu un filet de voix, dans le lointain."
Qui ne l'avait pas entendu? C'est fou ce que cette fille avait de bons poumons. Et Jörgen de sourire de plus belle, saluant la tentative de clin d'œil de sa doublure. Ignorant vaillamment les fou-rires et grimaces qui avaient envahi les visages de la moitié de la salle commune, le jeune homme décida de sortir avant que tout le monde ne soit victime d'une deuxième attaque auditive. Une otite généralisée un premier soir de fête, pas sûr que tout le monde allait adorer. Somme toute, il était prêt. Il avait troqué l'uniforme "élève de Poufsouffle" pour un pantalon et une chemise blanche. C'était suffisamment élégant sans être tout much. De son propre point de vue. Il détonnait sans doute un peu au milieu des costumes deux pièces choisis par certains mais au moins, il n'avait pas l'air d'un pingouin engoncé dans une enveloppe trop petite pour lui.
La solidarité Poufsouffle... Il était presque certain d'avoir reconnu la voix de McIntosh. Un haussement d'épaules salua l'interjection alors que Jörgen franchissait la barrière entre l'univers Poufsouffle et le monde réel. McIntosh ne comprenait pas. Personne ne comprenait vraiment. Tant pis.
Trois pas plus loin, il chercha Toni des yeux (la voix, c'était elle, pas de doute là-dessus) pour tomber sur une robe avec des .. hum, jambes, des bras, une tête scintillante et quelque chose qui ressembla soudain à de la bonne humeur.
- Salut.
Bref instant de solitude.
- Tu es très.... en forme, ce soir.
L'art du compliment, conjugué au masculin. C'était toujours mieux que l'autre, là, qui était sur le point de baver s'il ne fermait pas bientôt la couche.
*On va peut-être pas s'éterniser.*
Pour deviner où il fallait se rendre, il suffisait de se fier à ses oreilles. Bruit=musique=ambiance=fête. D'un léger mouvement de tête, il proposa à la jeune fille d'y aller et ils se mirent à avancer de concert en direction du parc.
- Euhm...
Un coup d'oeil à droite, un coup d'œil à gauche.
- Il n'est pas avec toi?
Il, une tête aux boucles blondes, une ombre aux yeux de gouffre. Baume au coeur, amputation sentimentale ou cure de sourire, il n'était pas tout à fait sûr.
Une chose était certaine, cependant, Jörgen ne s'était jamais sentit aussi bien.
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Lun 17 Aoû - 16:04:49
Pour toute réponse, Toni agita son petit baluchon en satin sous le nez de Jörgen. Avant de parler de leur "enfant", elle désirait faire un petit commentaire :
- Tu es assez mauvais en compliments… je t’apprendrai, le taquina-t-elle.
Elle prit plaisir à regarder l’effet de sa remarque sur le visage de Jörgen et saisit l’opportunité pour prendre son bras et commencer à se diriger vers le Parc. Il est probable qu’avant d’aller danser, boire et manger, Jörgen voudrait voir Thémis. L’enfant dormait sous sa forme de pierre. Une pierre blanche et lisse, comme la peau de cet être fabuleux.
Toni avait été des plus surprise, presque effrayée, lorsqu’un jour de pluie la pierre s’était transformée en nourrisson. Elle avait paniqué, ne comprenant pas d’où ce bébé pouvait provenir. Il était apparut là, sur ses genoux, à la place de la pierre de lune que leur avait donné un soir une vieille femme près de la fontaine du Boulevard du Souffle, à Paris.
Cela avait été toute une entreprise pour contacter Jörgen et le prévenir. Elle ne se voyait pas traverser l’école avec un bébé dans les bras… bébé qu’on lui aurait peut-être retiré ou pire, qu’on aurait pu soupçonner d’être le sien. Elle dut cacher l’enfant dans une des serres, sous les larges feuilles d’un palmier coton qui berça l’enfant jusqu’à son retour catastrophé. Elle avait tiré Jörgen de son entraînement de Quidditch pour le traîner dans les Serres sans lui dire de quoi il s’agissait. Elle ne savait pas de quoi il s’agissait et elle était incapable de l’expliquer. Quand ils arrivèrent près du palmier, l’enfant avait dispau. Toni crut qu’elle avait rêvé… à la place, la pierre de lune reposait sur une des feuilles. "C’est dingue !" s’était-elle exclamée. Elle eut d’abord peur que Jörgen aille penser qu’elle inventerait n’importe quoi pour passer du temps avec lui. C’était presque vrai mais elle n’aurait jamais songé inventer une histoire pareille.
Ils sortirent après que Toni eut essayé d’expliquer ce qui s’était produit dans le parc. Jörgen avait prit la pierre et la scrutait sans se prononcer. Quand ils furent de nouveau sous l’inverse, Jörgen sursauta. Dans ses bras, il tenait un enfant qui pleurait à chaudes larmes. Illico, les deux adolescents retournèrent en courant dans la Serre. Effrayés, mais cette fois deux à faire le même rêve, ils se penchèrent plus posément sur cette apparition.
"Il prendra l’apparence de ce qui vous est communément le plus cher" avait dit la vieille française. Il n’avait jamais été cher à Toni d’avoir un enfant. En tout cas, pas maintenant… La Gryffondor regarda d’un air très soupçonneux Jörgen qui contesta lui aussi. La paternité n’était pas encore une de ses lubies. "C’est vrai, enfin ! soupira Toni, on a déjà assez de mal à s’occuper de soi… de nous… que…"
Toni ne finit pas sa phrase. Le secret était peut-être là. Leur envie la plus profonde était peut-être de s’occuper d’eux. Au fond d’eux. Se faire du bien par le biais d’un tiers qui grandissait à une allure démente. En deux semaines, l’enfant qu’ils appelèrent temporairement Thémis, prit deux centimètres et quelques cheveux blonds lui poussèrent. Blond, à l’identique de la chevelure de Jörgen. Ses yeux noisettes et clair n’étaient quant à eux pas sans rappeler le regard de Toni. Les deux adolescents mirent très peu de temps de comprendre comment Thémis changeait d’apparence : l’eau le faisait devenir humain et la chaleur, comme celle qui régnait ce soir ou dans les serres, lui rendait sa forme de pierre.
Aujourd’hui Thémis ne marchait toujours pas mais il paraissait avoir un an. Ces derniers temps sa croissance avait ralentie. Pour le nourrir, Toni avait demandé à Shawn de lui dégoter du lait maternel… Evidemment le Serpentard avait faillit s’étrangler. Néanmoins, comme à son habitude et malgré une curiosité palpable, il ne posa pas de question et Toni entra en possession d’un stock de lait maternel et de purée de citrouille premier âge qu’elle et Jörgen cachèrent dans le cœur d’une armure du troisième étage.
Au jour d’aujourd’hui, ils ne savaient ni l’un ni l’autre ce qu’allait devenir cet enfant ni ce qu’ils devaient en faire. S’il continuait de grandir ainsi, dans six mois, il aurait six ans.
Jörgen et Toni s’embusquèrent derrière un chêne qui bordait la forêt Interdite en direction des lumières et fanion de la fête qui brillaient au loin près du lac. La chaleur était très dense ce soir et Thémis n’était qu’un galet.
Toni ouvrit son baluchon et le tendit à Jörgen. Il était irrationnel de se rendre compte à quelle point elle éprouvait une sensation paisible et sereine au contact de la Pierre de Lune. Pour elle, Thémis représentait leur reconstruction, la sienne et celle de Jörgen.
- Il n’a pas encore mangé mais, à vrai dire, il fait tellement chaud qu’à part sous la douche, je ne vois pas comment on pourrait faire ce soir. Il y a le lac aussi… laissa-t-elle planer en jetant un regard par-dessus l’épaule de Jörgen. Mais dans ce cas, je dois retourner chercher le lait en haut…
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Mar 25 Aoû - 16:14:01
*Sous la douche?*
Thémis, Toni et lui, sous la douche? Ok, on passe.
L'eau. L'eau de la grotte de Siemens. La glace de Seagaard. Le sel et l'amertume des larmes. Le gris de la pluie. La fontaine du boulevard du Souffle. L'eau, c'est la vie. L'eau, c'était un peu leur vie aussi. Depuis le début, elle était là, dressant l'arrière-plan de chacun de leur rencontre. L'eau, encore et toujours, comme un leit-motiv. Un hasard? Une évidence? Allez savoir.
La mention du lac sauta comme une bénédiction aux oreilles de Jörgen qui s'empressa de sauter sur l'occasion. S'occuper un peu de Thémis, c'était s'éloigner de la foule d'un soir de fête. Et s'il y avait une chose dont le jeune homme ne raffolait pas, c'était bel et bien de la foule.
- Je... oui, c'est une idée!
Autant d'entrain à l'idée d'alimenter un nourrisson, pour un garçon de son âge, il y avait de quoi faire hausser plus d'un sourcil. Seulement, ils y avaient veillé, l'existence de Thémis était un secret absolu. Le seul haussement de sourcil à l'horizon ne pouvait venir que du visage de Toni et Jörgen ne s'en inquiétait pas. Ils partageaient ce sentiment de réconfort à prendre soin du petit garçon, inexplicablement, peut-être, mais incontestablement surtout. Et qu'on ne lui parle pas de fibre paternelle. C'était moins, c'était plus, c'était autre chose. Thémis, c'était un peu lui, c'était un peu elle, c'était un peu eux. L'aube qui évacue le cauchemar.
L'aube leur avait été offerte par cette vieille femme édentée, agitant son petit sac de velours usé comme Trelawney son pendule. Devant l'insistance de cette femme et face au refus obstiné de Jörgen de faire quoi que ce soit, Toni avait fini par se saisir délicatement du sachet. Il ne contenait qu'une petite pierre qui, hormis ses reflets bleutés, ne payait pas de mine.
Un peu plus tard dans la soirée, ils l'avaient observé avec plus d'attention, désoeuvrés. Au début, rien. La pierre passa d'une main à l'autre, frémissant à peine, comme si elle les testait. Et puis, c'était devenu un peu.. surnaturel. A peine détachaient-ils leurs doigts de la surface minéral que s'en échappaient de longues volutes d'un or sombre, que Jörgen aurait peut-être pu comparer aux birbes de souvenirs offertes à une pensine si seulement il avait su de quoi il s'agissait. A chaque brume dorée, c'était ses épaules qui devenaient plus légères, bien qu'il mit un moment à percevoir le processus. Le poids du secret, de la culpabilité, du doute, du manque... c'était un peu tout ceci qui s'envolait.
Sous leurs doigts, la pierre s'était brièvement réchauffée, insufflant un peu de vie à son coeur de pierre, dissolvant la boule de sa gorge, formidable démêlant pour noeuds d'entrailles. Un premier sourire avait point, lentement un deuxième lui avait fait écho. Ils n'avaient peut-être pas compris mais ils avaient senti. La différence.
De derrière leur chêne, c'est à mi-voix (savait-on jamais) que Jörgen lança sa suggestion:
- Je connais un coin, un peu plus loin. Plus loin que la Cabane de Hagrid. Il y a une sorte de ru. Personne n'y va jamais.
Pas même les soirs de fête. Serrant précautionneusement "Thémis" au creux de son poing, Jörgen s'empara de la main de Toni. Par réflexe. Par habitude. Parce que c'était réconfortant.
- C'est là.
Juste le bruit de l'eau à la place du brouhaha des élèves. Un peu de calme. Un peu de silence. Ils iraient, après, si elle en avait envie. Mais avant... Un peu de solitude.
- Je me suis entraîné.
Démonstration baguette en main. Sa mère n'avait pas posé de questions quand il l'avait interrogé, par hibou interposé. Cela viendrait, pendant les vacances. Toujours est-il qu'il connaissait la formule pour faire apparaître du lait. Pas LA solution au quotidien (apparemment, rien ne valait la boisson que leur procurait Toni) mais en cas d'urgence...
Toni Scheffer ❧ Inactif
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Sujet: Re: Le début et la fin Mar 8 Sep - 11:02:52
Peut-être que si Toni allait nager dans le Lac Noir tous les jours depuis le 2 septembre 2003, le lendemain de son arrivée à Poudlard, ce n’était pas comme elle le pensait un désir conscient mais un appel surnaturel de cette étendue somptueuse. Le Lac venait à elle quand elle n’allait pas à lui. Les deux seules fois où elle avait décidé de ne pas aller nager, elle s’était retrouvée malgré elle dedans.
La première fois avait été le 8 décembre de l’année dernière. Une tempête de neige s’était abattue sur Poudlard et dans ces conditions aller nager lui paraissait compromis. Mais ce jour là coïncida aussi avec la disparition d’Emily, une jeune Gryffondor de première année. Elle avait été chahutée un peu trop fort par une équipée sauvage de Serpentard et, triste, elle s’était enfuie du château pour marcher près du Lac dans lequel elle tomba. Ne la voyant pas à table à l'heure du déjeuner Toni avait à son tour chahuté les Serpentard qui finirent par confier qu’ils avaient vu Emily se diriger vers le Lac. Toni était sortie en courant. Une écharpe rayée rouge et or flottait à la surface gris blanc du lac. A quelques mètres du bord, malgré le givre qui lui foutait les yeux et le visage, Toni remarqua une petite forme noirâtre qui se débattait sans y croire. Elle avait plongée. Deux heures plus tard, Emily et elle étaient à l’infirmerie et les quatre Serpentard perdaient vingt points chacun mais gagnaient six heures de colle. Malgré un rhume carabiné, le lendemain Toni alla nager dans l’eau glacée.
La deuxième fois était ce soir. Toni n’était pas allée nager aujourd’hui. Elle avait dédié sa journée à la préparation de cette fête avec d’autres élèves et à la coquetterie. Coquetterie qui apparemment n’aura duré le plaisir que de quelques minutes. C’était Japhet qui allait être déçue. Mais cela fit sourire Toni… Encore une fois, le Lac, l'eau, l’appelait.
L’endroit que lui fit découvrir Jörgen, Toni le trouva enchanteur. Pour un bain et un biberon, on aurait rêvé endroit plus atypique. Il faisait très chaud ce soir. La canicule de la journée laissait traîner ses lambeaux de soleil dans le sol, les feuilles, l’atmosphère humide et chargée, l’eau tiède et les pierres qui respiraient un parfum de talc brûlé. Le relais donné à la lune par l’astre du jour donnait l’illusion que la dame grise se chargeait à son tour de réchauffer la nuit. A cause de cette chaleur, Toni savait que Thémis ne garderait pas son apparence humaine tout le temps du biberon.
Un air malin étira les lèvres de Toni : "A l'eau O'Brian !" pensa-t-elle amusée.
Elle retira ses chaussures, s’assit sur la rive du petit ru et y plongea ses pieds dans un soulagement dont un long soupir vint trahir la profondeur. Ses pieds compressés par la chaleur et le cuir du soulier à talon lui rappelèrent le jour où Meghan et James lui avaient tendu un piège pour qu’elle se retrouve avec Jörgen. A cette époque, elle ne sentait plus la douleur. Ni le soulagement. Après avoir rencontré la vieille sorcière près de la fontaine, Toni avait laissé ses chaussures sur le rebord et marché nus pieds jusqu’au retour à l’auberge de jeunesse. Le Poufsouffle, sans doute par pitié, avait eu la générosité de la prendre sur son dos pour une partie du trajet du retour car les rues de Paris étaient bien moins propres que celles des sous sols de la ville.
Flashback
Il devait être six heures du matin mais les lumières de l’aube refusaient de poindre. On ressentait partout autour une angoisse indescriptible mais il était encore trop tôt pour s’inquiéter vraiment… mais plus tard à 9h, puis 10h, puis midi, puis 17h, la panique générale gagnerait le monde entier. Vendredi 15 mai : le jour où le soleil ne se leva pas.
Toni était perchée sur le dos de Jörgen et piquait du nez. Elle tenait contre son cœur le baluchon avec la pierre que la vieille femme leur avait échangé contre la vieille paire de souliers de Toni… La Gryffondor avait brièvement repensé aux souliers d’argent de Dorothy. Etait-ce le bout du chemin ? avait-elle songé.
- Jörgen, murmura presque endormie la quatrième année, je te remercie… tu m’as manqué.
Elle s’était quasiment endormie à la fin de sa phrase alors que Jörgen atteignait l’entrée près du pont Alexandre III. Elle ne savait pas comment ils avaient échappé à la punition d’être sortis malgré l’interdiction qui avait frappé les élèves de moins de 15 ans. Tout le monde devait dormir à l’heure à laquelle ils étaient rentrés. Mais le plus étonnant fut qu’elle s’était réveillée à midi, dans son lit, les pieds propres et changée en robe de nuit. Le Poufsouffle ne lui avait jamais raconté ce qu’il s’était passé. Elle avait - à juste titre - pensé que l’anomalie qui avait perturbé l’arrivée du jour avait fait oublier à tous les problèmes les plus mineurs.
Quant à elle, elle avait été moins perturbée par l’absence du jour que par l’énigme de la pierre de lune.
Toni ne résista pas à la douceur de l’eau. Elle retroussa sa robe jusqu’en haut de ses cuisses puis avança dans le ru jusqu’à trouver un endroit où l’eau lui arriva jusqu’à mi cuisse. Elle laissa Jörgen baigner Thémis et s’adonner au rite de la nutrition.
Elle aimait le regarder quand il était avec Thémis... bizarrement, elle avait l'impression qu'il s'occupait ainsi d'une partie d'elle. Elle s'était toujours bien gardé de lui confier cet étrange sentiment.
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
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Sujet: Re: Le début et la fin Ven 11 Sep - 18:44:58
C'est donc les pieds dans l'eau et la baguette dirigée tout droit vers la bouche de l'enfant que Jörgen entama la soirée. Assis sur un rocher, il s'occupait du nourrisson avec attention. Le jeune homme se penchait à intervalle régulier pour humidifier la peau de Thémis qui en profitait pour lui dégouliner allègrement sur le pantalon, un sourire rêveur accroché au visage. C'était étrange comme il se sentait responsable du petit être qui tenait à peine au creux de son bras, mais sans pourtant le poids que la charge d'un enfant était censée faire peser sur ses épaules. Il n'analysait pas le phénomène plus en avant. A vrai dire, sa vie était devenue d'une simplicité rassurante. Il y avait d'un côté, le rythme monotone des cours avec son cortège de devoirs et TP, et, de l'autre, quelque chose qui avait vraiment le goût de la vie, ces moments qu'il avait l'impression de voler à il ne savait qui et qu'il partageait avec Toni et Thémis. C'était simple et reposant, calme et détendant.
Depuis le début de leur amitié, il n'avait jamais passé autant de temps avec la Gryffondor et, sans vraiment s'en rendre compte, il cherchait de plus en plus sa compagnie. Jörgen n'avait jamais été l'animal sociable par excellence, il ne négligeait donc personne, si son quota de solitude auquel il n'était, finalement, pas si attaché. Il n'y avait qu'un bémol dans sa paix béate retrouvée et qui avait pour nom Sakura. Jörgen gardait la volonté farouche d'agir comme si rien n'avait changé. Seulement, il pouvait se mentir à lui-même mais la vérité était là: le séjour à Paris avait été un tournant et il n'avait pas encore trouvé comment intégrer à sa juste mesure la jeune fille dans ce qu'il appelait sa "nouvelle vie".
Mais il remisa le sujet pour plus tard. Pour l'heure, il n'y avait plus que Toni qui avait massacré sa tenue de soirée pour un peu d'eau. Et Thémis qui acheva sa première tétée-baguette dans un rot ravi.
*Et puis, il y a moi.*
Et puis, il y avait lui dont le regard s'était fixé sur un point flou du lointain pour ne pas s'attarder sur les jambes de Toni. Il finit par abaisser sa baguette et la glisser dans la poche de son pantalon. Pantalon dont le bas mouillé battait ses mollets. Au point où il en était, un peu d'eau en plus ou en moins n'y changerait pas grand chose. Et il avait envie de garder Thémis encore un peu plus longtemps avec eux. Comme il ne pouvait pas demander à son amie de gâcher sa tenue qui devait coûter une petite fortune (sans compter que les filles étaient tellement plus attachées à l'allure de leurs vêtements), il se sacrifia pour la bonne cause et transforma sa chemise en éponge dégoulinante en lui faisant prendre un bain forcé. De toute façon, par cette chaleur, il serait sec avant qu'ils aient rejoint les autres.
- Toni?
Sa voix le surprit lui-même.
- Tu... J'aimerais...
Son regard chercha le sien au-dessus de la surface aquatique.
- ... vraiment que tu viennes quelques jours chez moi, cet été.
"Tu", pas "vous". L'invitation ne tenait pas qu'à la présence de Thémis dans leur espace de vie commun. Jörgen esquissa l'ébauche d'un sourire avant d'ajouter:
- Et tu es belle, là comme ça.
L'air de dire "je fais des progrès, tu vois?". C'était vrai qu'elle avait quelque chose maintenant qu'elle était plus naturelle, moins comme toutes les autres dans leur belle tenue. Même si Toni n'avait jamais été comme toutes les autres. La maladresse, elle, était toujours là:
- Tu veux qu'on y aille?
Par "y", comprendre la fête où s'agglutinait tout ce que Poudlard comptait d'adolescents en mal d'émotions.
Toni Scheffer ❧ Inactif
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Sujet: Re: Le début et la fin Lun 14 Sep - 13:29:02
Mon cœur bat. Je suis vivante. Bam, bam… Il se brise parfois. C’est que je vis. Crac. Mon Coeur s’envole, devient lourd, crève, saigne, rit, frissonne, grelotte, s’étonne encore. A toute allure, je veux vivre. Bam. Paf. Il frappe fort et des fois je crois qu’il va s’arrêter. Il ne peut pas survivre à une activité aussi intense. Vlan. Il me flanque la frousse, s’apaise, ralenti, devient imperceptible, il m’arrive d’oublier qu’il bat… jusqu’à la prochaine fois où il me fera savoir qu’il est là et que je suis en vie. J’ai beau essayer, je n’arrive pas à le comprendre. Tout ce que je sais, c’est que je vis et que je ne comprends rien à la vie. J’ai besoin de savoir ses secrets, j’ai envie de comprendre, de m’arrêter de respirer à certains moments, juste pour prendre le temps de ne plus ressentir. M’arrêter et seulement regarder, penser, prendre de la distance. Mais je ne sais pas faire ça, prendre de la distance. Il frappe, se brise, éclate, s’extasie, vlan, me fout une de ces raclées, s’endort, s’emballe, se referme, explose sans que je ne puisse rien faire, rien comprendre. Je vis. Je… je revis… Et ça m’étonne jour après jour de vivre sans comprendre pourquoi. Mais dans ces moments, ces instants où je n’arrive pas à faire taire l’Incompréhensible qui me submerge, il y a comme une brève explication qui brille l’espace de quelques instants… elle prend des formes différentes… ça dépend des moments. Ces derniers mois, toutes les formes que prennent ma raison d’être et les balancements de mon cœur ressemblent à Jörgen.
"...mon cœur bat pour toi."
Alors ces simples paroles un peu mièvres prennent soudain tout leur sens.
Toni caressait mécaniquement la surface de l’eau tout en regardant Thémis et Jörgen. Jörgen dans les yeux. Elle se noyait... Elle s’était arrêtée de penser car elle ne savait plus faire les deux en même temps, penser et sentir. Ca se traduisait par une sorte de silence contemplatif et béat. Des vacances ? Belle ? La Fête... Pourtant, elle n’avait qu’un oui à répondre. Elle n’avait pas besoin de réfléchir. Le oui s’était dessiné dans ses pupilles avec la même vivacité et la même détermination qu’une jeune fille amoureuse que son âme sœur demande en mariage.
"Mon cœur bat" se répéta-t-elle. C’était idiot de se le dire. C’était tellement évident. Maintenant devant eux, elle se sentait vivante. Le reste lui semblait absurde. Il était la seule évidence de sa jeune vie. Cela avait quelque chose de terrifiant.
Elle avait tellement envie de se jeter contre lui et de ne plus bouger. Mais elle ne voulait pas le terrifier ou le perdre encore.
Il la trouvait belle là comme ça. Quelques mots qui changent un univers. Pas le compliment mais ce qu'il signifiait pour elle parce que Jörgen parlait si peu comme ça. La surface de Toni était calme mais à l’intérieur, le séisme cardiaque ébranlait de son onde de choc le moindre atome de son âme et de son corps. Elle savait qu’elle en était amoureuse. Elle le savait depuis très longtemps. Seulement, elle venait juste de réaliser à quel point. Même soumis à son étrange trinité, ce garçon lui semblait unique.
Dans les bras de Jörgen, Thémis se mit à pleurer. C’était la première fois qu’il pleurait. Le cri fit revenir Toni à elle-même. Elle fendit l’eau jusqu’à eux, inquiète, troublée.
"Se peut-il que Thémis ressente ce que je ressens ?"
Si l’enfant de la lune était une partie d’eux deux, un témoignage magique de leur vie, de leur vivant et de leurs émotions… Toni posa sa main sur le front de Thémis. Elle croyait comprendre ce qu’il lui arrivait. Elle devait le rassurer. Elle allait tenir bon et ce qu’elle ressentait pour Jörgen se transformerait en une chose positive pour préserver leur amitié. En effet, pour le moment, la Gryffondor ne voyait rien de bénéfique dans cet amour.
- Je peux ? demanda-t-elle à Jörgen en prenant Thémis dans ses bras.
Elle le berça en souriant.
- Shhsshhh… shusshh, Thémis… tout se passera bien, murmura-t-elle.
L’enfant se calma… pas assez d’eau. Il se transforma en pierre… Toni s’assit dans l’eau et tint Thémis à flot, allongé dans ses bras. La robe était définitivement fichue. Quand il reprit sa forme humaine, Toni sourit joyeusement à Jörgen à côté duquel elle était restée. Elle posa sa tempe sur les genoux du Poufsouffle avec affection :
- Ca serait super chouette de venir passer les vacances avec ta famille et toi…
Thémis était calme et ronronnait en s’endormant. Toni releva sa tête et son buste, sourit à l’enfant qu’elle rendit à Jörgen pendant qu’elle sortait de l’eau pour s’essorer. Un craquement se fit entendre… quelqu’un approchait…
- Mince ! Thémis ! paniqua Toni.
L’ombre de Kévin apparut. C’était le garçon dont elle avait un jour entendu les exploits dans les Serres, coincée avec Shawn. Il les scruta dubitatif :
- Qu’est-ce que vous faites ici… ?
D’après le ton de sa question, on avait l’impression qu’il pensait être tombé sur le ragot du siècle.
- On… je… rien.
Kevin regarda tour à tour Jörgen et Toni mais n’eut aucun regard pour Thémis qui dormait dans les bras du Poufsouffle.
- O’Brian ? Tu fais quoi dans cette position bizarre ?
Là, ça devenait effectivement très bizarre. Kevin ne semblait pas pouvoir voir Thémis. C'était une nouvelle pour Jörgen et Toni qui avaient toujours fui la foule sans se demander si d'autres qu'eux pouvaient voir l'enfant.
- Je lui apprends à danser, dit sottement Toni. C’était la première chose qui lui était passé par la tête.
Soupçonneux encore :
- Dans l’eau ? - Oui, t’as pas vu Dirty Dancing ? dit-elle en bonne moldue quand Kévin était 100% sorcier. - C’est quoi ça ? - Un film moldu, bref, tu déranges Kévin…
Kévin ressentit enfin que sa présence gênait. Il rougit. Toni aurait alors parié sa baguette que si à son tour elle demandait à Kévin ce qu’il faisait ici, la situation s’inverserait. Qui serait le plus gêné…? Au loin, les trois adolescents entendirent une voix féminine appeler après Kévin. Ils avaient leur réponse. Toni se moqua pour retourner la situation :
- Il est lààààààààààààààààààààààààà ! hurla-t-elle au grand désespoir de l’intrus qui vraisemblablement ne souhaitait pas que le couple connaisse l’identité de sa dernière conquête car de source publique Kevin était avec Margot, la française... or la voix qui l'appelait "son petit sorcier d'amour" avait un accent on ne peut plus écossais.
Toni venait de s’offrir le silence forcé de Kévin. Il ne propagerait pas de ragot sur Jörgen et elle. Sakura n’aurait pas à se torturer…
- Je… je me suis perdu, lâcha Kévin en tournant les talons, bon, ben bonne soirée, à plus, fit-il sans demander son reste, fuyant à grande enjambées à travers les fourrés avant que la demoiselle n’arrive à eux et fasse connaître son identité.
Toni explosa de rire :
- Qu’il est bête !
Se calma aussi tôt en retournant près de Jörgen :
- Tu m’invites à danser ?.... ici, sourit-elle avec complicité, je n’ai pas envie d’aller à la fête ce soir. Et puis, dit-elle malicieuse, il reste trois jours !
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Dim 20 Sep - 16:04:50
- C'est vrai?
Un deuxième "c'est vrai", à peine plus tard, séparés par les pleurs de Thémis et l'intervention inopportune de Kevin. Themis s'était calmé, Kevin avait fui au loin, et Jörgen souriait. Tout était au mieux.
- C'est vrai?
Un premier "c'est vrai" qui était un "c'est vrai que tu viendras chez moi pour y affronter ma famille?", elle qui avait déjà eu droit aux cousins du Grand Nord. Une réminiscence le frappa alors, un petit quelque chose d'énorme que les événements de janvier avaient réussi à occulter. Ou bien, peut-être cela l'arrangeait-il de faire comme si de rien n'était. Un petit quelque chose d'énorme qui parlait de boulangerie et de gourmandise. Ca le frappa comme un coup de poing dans le ventre même s'il n'en laissa rien paraître. Comment avait-il pu...? Un instant d'hébétude. Là, maintenant, avec tout ça qui ressurgissait, ça aurait été facile de donner. De donner et de prendre. C'est ce que James aurait fait, il était prêt à le parier. Mais il n'était pas James et, pour la première fois depuis longtemps, ce simple constat remplit l'espace de son ampleur rassurante. Il aurait pu, oui, mais il s'y refusait. Le moindre faux pas verrait Toni s'envoler Toni au lointain, il en était certain. Et il ne pouvait pas se permettre ce luxe. Il ne pouvait pas se permettre ce risque. Il tenait trop à elle pour ça. Et puis, il y avait qu'elle ne méritait pas ça....
Un deuxième "c'est vrai", presque incrédule devant l'alternative "la fête ou moi" où personne au monde n'était supposé choisir l'option un. Et pourtant... Le flash lança un dernier appel.
...qu'elle méritait mieux.
Le visage de Jörgen s'ouvrit. Ce n'était pas la même chose que lorsque son regard se portait sur Thémis. Pas la même chose non plus qui éclairait son visage lorsque son équipe remportait un match de Quidditch. Mais, pas plus qu'alors, il n'en avait pas conscience. Quelque chose s'ouvrait dans sa carapace, le rendait un instant vulnérable. Si on voulait l'atteindre, c'était ce signe-là qu'il fallait guetter. Un immense sourire s'afficha sur ses traits que même la perspective de danser ne réussit pas à affadir. A son dilemme, il ne trouva qu'une solution: occulter ce petit quelque chose énorme. Alors, il se contenta de la prendre contre lui et d'oublier. De la prendre contre lui parce qu'elle voulait danser. Parce que lui ne savait pas. Et que tant qu'à être ridicule, autant demeurer son seul et unique spectateur. Parce qu'envers et contre tout, elle était son amie.
La musique était trop lointaine pour vraiment les porter. Danser avec musique était déjà une épreuve, danser sans relevait tout bonnement de l'utopie. Chanter était relativement moins risqué. Tous les Irlandais savaient chanter leur terre natale. Bon, il est vrai qu'en théorie, ces mêmes Irlandais avaient la danse dans le sang mais il passerait sur ce détail. Jörgen se mit à fredonner doucement, presque pour lui-même:
- Marv Brian Boru 'rein buhez 'n Iwerzhon Dihan e Bro-Ulad ha ba ker Dulenn Undedan tiegezhn unded an dud-man Unded ar Gelted hag an douar
Chacun a sa manière de célébrer les choses. Et même si Jörgen n'y était pas pour grand chose dans le diplôme des universitaire, il avait trouver sa façon à lui de fêter. C'était sobre et c'était bien. Thémis, redevenu pierre de mystère, reposait au creux de sa poche.
- Je suis curieux... Dirty Dancing, c'est quoi? Un truc où ils dansent dans la boue...?
Ente autres choses, il avait retrouvé le goût des Moldus.
Dernière édition par Jörgen O'Brian le Mer 23 Sep - 14:46:55, édité 2 fois
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Lun 21 Sep - 17:04:53
- Un truc qui se.. qui se danse dans la boue ? Qu’est-ce que tu racontes sorcier inculte ? C’est un film d’amour génial.
Il n’avait pas duré mais Toni avait eu le temps de le voir. Un rien du tout. Une pupille vaguement dilatée juste après le premier « c’est vrai ? » Elle l’avait vu et elle l’avait surtout senti. Sans certitude, elle aurait pu tenter de donner une forme ou un nom à ce qu’elle avait vu. Oui, vraiment rien du tout… ça relèverait même plutôt du talent qu’ont les filles pour les sentir les choses que d’une lueur d’intelligence. Justement, c’était comme une lueur dans la pupille dilatée de Jörgen. Elle avait à peine eu le temps de l’apercevoir que la lueur avait disparu. S’il avait fallu nommer cette ombre qui était vaguement passée, Toni l’aurait appelé une Sakura. Ca n’avait pas persisté sauf dans l’esprit de Toni.
Alors qu’elle dansait sur le rythme défait d’un air irlandais, la lueur dans le regard de Jörgen devint une petite ombre qui planait désormais au-dessus d’elle. Comment avait-elle fait pour oublier une chose pareille ?!
"Il devrait être avec elle maintenant…"
Que faisait-elle là ? Pourquoi était-il avec elle ?
L’ombre s’épaissit et faillit gâcher la danse. Mais la Rouge s’accrochait. Au cou et aux épaules de Jörgen mais aussi à sa propre capacité d’auto-persuasion. Elle se le disait à chaque fois que « ça » arrivait.
"Ce n’est pas le moment… ce n’est pas le moment… ce garçon n’est pas pour moi…"
C’est dur, hein, de se faire croire des choses ? Surtout quand on vient de s’apercevoir à quel point l’autre comptait pour soi.
Toni frissonna. Elle n’aurait su dire qui du souffle de Jörgen ou des lamentables pensées qui la hantaient en étaient la cause. Elle redressa légèrement les yeux vers lui, décidé à sortir son parapluie imaginaire avant que le nuage sombre qui planait au-dessus de leur tête ne se mette à pleuvoir et à tout gâcher.
"Un jour, il faudra qu’on parle de nous…" savait-elle "mais pas maintenant."
Elle lui sourit avec complicité tandis qu’il chantait. Il fallait cacher un peu plus combien elle était séduite alors elle opta stratégiquement pour une gentille dérision qui, croyait-elle, ferait rentrer dans l’ordre les idées de tout le monde ici présent :
- Mmm, soupira-t-elle, Jörgen, pourquoi n’es-tu pas mon Romeo ? C’est avec lui que je devrais être maintenant… Je veux dire Romeo McCarthy, l’autre irlandais… tu sais celui de Gryffondor. Je ne lui ai toujours pas dit ce que je ressens pour lui…
"Et pour cause, je ne ressens strictement rien pour ce poseur caricatural…"
- Notre amitié nous empêche de vivre nos amourettes… en tout cas, pour toi, je ne sais pas, mais pour moi, c’est le cas. Souvent, je me sens tellement bien avec toi que le reste ne compte pas… tu favorises ma paresse à nouer des liens avec les autres ! fit-elle semblant de l’engueuler. Je te promets que pendant les vacances, ça va changer ça ! Il sera là J.S. ?
Toni était persuadée que, sous couvert de confidences amicales, suffisamment de pics, de doutes et de n’importe quoi pour brouiller les pistes sur son état réel avait été semés. Elle devait aussi rappeler à Jörgen que lui, pour de vrai, quelqu’un l’attendait.
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Mer 23 Sep - 15:32:29
- Tu regrettes?
En l'intervalle de dix secondes, ces deux mots avaient changé de teinte. Ils étaient devenus affirmation.
- Tu regrettes.
Un pincement dans la poitrine.
*L'orgueil, mon vieux, l'orgueil.*
L'orgueil qui gonfle comme une poche de protection entre soi et le monde, entre soi et l'image impitoyable que nosu renvoie le regard-miroir des autres. Jusqu'à présent, l'orgueil de Jörgen avait eu pour nom Toni. Exprimé avec des mots, ça sonnait sans aucun doute bizarrement mais l'idée était là. Depuis leur rencontre sous l'accalmie de Portsmouth, elle avait un peu son garde-fou tout en le faisant se sentir lui, ce qui n'était pas une mince affaire. Il y avait d'ores et déjà, bien sûr, le Jörgen-capitaine, le Jörgen-frère-de-James, le O'Brian-mais-lequel-est-ce, le Jörgen-de-Sakura. Mais le Jörgen-tout-court, le Jörgen-lui avait fait son apparition avec elle. Il avait morflé, il avait souri, il avait souffert, il avait revécu. Et là... Comme tout ce que prononce une fille, il y avait plusieurs niveaux de compréhension dans ce qu'elle venait de dire. Il y avait ce qu'elle voulait qu'il comprenne et ce que lui voulait comprendre, avec au milieu, toutes les attentes d'un côté et toute la mauvaise volonté du monde. et, par-dessus tout, il y avait ce qu'il avait peur de comprendre. Les sous-entendus n'étaient pas son fort mais il tentait malgré tout le décryptage. ERt le décryptage ne lui disait rien qui vaille. D'où sa quasi-certitude que Toni lui reprochait plus ou moins implicitement de l'accaparer. Il aurait dû s'en douter, sentir que c'était trop beau pour durer.
*Arrête de te prendre la tête, mon vieux... tu vois, elle est passée à autre chose.*
La autre chose en question, un troll de 1m80 incapable de voler droit, lui donnait des envies de punching-ball. Mais ne rien dire. Rester l'ami de toujours, souriant du bonheur retrouvé. Il ne put s'empêcher une pointe de curiosité. Le ton n'était pas exactement amène.
- Tu lui avais proposé pour ce soir?
Faisant de lui-même le deuxième choix? La perspective était relativement déplaisante. Plus déplaisante encore était l'idée que le "oui" de Toni pour l'été à venir ne soit qu'un prétexte pour tenter de revoir J.S. Et, cette fois, ce fut plus fort que lui:
- Non, il ne vient pas. Il voulait faire un tour au Népal.Il a toujours été fasciné par le yéti.
Qui se ressemble... Ok, c'était vraiment énorme comme prétexte mais. Bon. Voilà. Tant bien que mal, il réussit à afficher son sourire habituel (plutôt mal, en l'occurence). Au fond de sa poche, Thémis-la-pierre pesait de tout son poids.
- Tu sais, je...
Comme d'habitude, les mots le fuyaient. Il manquait d'entraînement.
- Si tu veux aller le rejoindre... Mais s'il te plante, je lui mettrais avec plaisir mon poing dans la figure.
C'était le sort réservé aux imbéciles au mauvais goût. Le silence s'installa. Et dura.
- Moi, je ne regrettes pas., les mots s'échappaient dans un filet de voix tandis que le regard de Jörgen errait en direction de la forêt. Et je vois pas pourquoi je squatterai avec d'autres si je suis bien avec toi.
Pourquoi en effet? Les dortoirs et les cours imposaient déjà une promiscuité indésirée. Son temps libre, il pouvait bien le passer avec les gens avec qui il se sentait à l'aise, simplement, sans se forcer.
Jaloux. Il était jaloux.
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Dim 27 Sep - 13:01:21
Non. Rien de rien, je ne regrette rien...
Il avait mordu et il ne fallait pas lâcher maintenant. C’était un petit coup pour un grand bien. La mère de Toni disait toujours que ce qui nous faisait mal maintenant nous rendrait plus fort après. Bah ça faisait un mal de chien de blesser intentionnellement Jörgen. La Gryffondor savait exactement où elle venait de frapper. En plein dans l’ego. Même sans amour amoureux, ça faisait toujours un petit peu mal.
Elle avait envie de le serrer dans ses bras et de lui dire "mais non, je te faisais une blague voyons ! Si tu savais ! Si tu pouvais seulement comprendre à quel point je tiens à toi." Mais ce n’était pas ça le plan. Il ne s’agissait pas de s’éloigner de lui mais de lui rendre la liberté qu’elle avait l’impression de lui voler. Ils auraient toujours Thémis pour les réunir.
- Tu regrettes? Tu regrettes.
Elle sourit pour lui faire un petit non admirablement bien mal-joué tout en s’accrochant un peu plus à son cou.
- Non, il ne vient pas. Il voulait faire un tour au Népal. Il a toujours été fasciné par le yéti.
Elle ne dit rien. Cacha son visage dans le cou de Jörgen pour ne pas le regarder, pour ne pas se trahir, pour que tout passe plus vite.
- Tu sais, je... Si tu veux aller le rejoindre... Mais s'il te plante, je lui mettrais avec plaisir mon poing dans la figure.
Le silence s'installa. Et dura.
- Moi, je ne regrette pas. Et je vois pas pourquoi je squatterai avec d'autres si je suis bien avec toi. - Moi aussi je suis très bien avec toi... je voulais seulement qu’on prenne conscience qu’à rester tout ce temps tous les deux, nous passons peut-être à côté de... des autres. J'ai pas officiellement demandé à Kev mais il a dit à une fille de ma classe qu'il m'aimait bien - je suis une mythomane - alors je devrais peut-être en profiter. On a encore demain et après demain. Ce soir, c'est toi et moi mais dorénavant, il faut que tu me laisses tranquille.
Ca me brise de dire une chose pareille. Pardonne-moi Jörgen...
Comme elle n’en avait rien à faire des autres. C’était un supplice de lui mentir. Pour évincer le cas de conscience que ça lui posait, elle le contrecarra à grand renfort de rire. Comme si elle s'amusait de cette situation qu'elle ne prendrait pas trop au sérieux.
Ils dansaient toujours sur le silence mais Jörgen avait arrêté de chanter. Ca lui semblait tellement naturel d’être pendu à son cou que Toni venait à peine de s’en rendre compte. Elle s’écarta de lui, bloquée dans un rire qu’elle n’espérait pas trop faux.
- O’Briannnnn ! Toi... Arrête de jouer aux jaloux ! Ca ne te va pas du tout ! Tu es beau quand tu es jaloux. Ce n’est pas parce que j’ai envie d’avoir un petit ami que je regrette les moments qu’on passe ensemble. Ah, ça, non. Non. Je ne regrette rien... Il faut juste qu’on se dé-scotshe quoi ! Mais pas trop longtemps, d’accord ? Sakura doit se poser des questions... Je l’envie. Tu t’en rends compte que tu es avec une amie au bal de fin d’année ? Et j’en suis tellement fière. Je déteste ça. J’adore ça et je me fous de tout le reste. Parce qu’un jour tu vas peut-être me reprocher de t’avoir pris tout ce temps. Mais je n’aurais rien regretté. Promis. Jörgen... Mon Toi. Je me demande même si passer les vacances ensemble est une bonne chose. Royale bouse ! Qu'est-ce que je dis ? Bien sûr que c'est une idée géniale ! Tous les deux avec Thémis sans les cours... ferme-la Toni ! On pourrait garder Thémis un mois chacun et se voir en milieu d’été pour se l’échanger.
La pierre vibra dans la poche de Jörgen. En phase avec les contradiction de Toni, Thémis ne comptait pas rester silencieux. Mais le langage de la pierre ou celui d'un nourrisson n'était pas assez clair pour complètement trahir ce qu'il se passait.
Toni s’approcha de lui avec inquiétude, oubliant toute cette discussion :
- Quelque chose ne va pas ?
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Jeu 1 Oct - 15:34:17
Le bon vieux pincement dans la poitrine est devenu une torsion du nerf coronarien à tendance grosse crampe bien douloureuse. L'espace d'un instant, Jörgen fut pris de la certitude fulgurante que si Themis s'était trouvé sous sa forme humaine, il serait mis à hurler. Cette impression fut fugace et s'évapora dans un souffle, celui qu'il avait retenu, accumulant la tension. A mesure que Toni parlait, il se tendait imperceptiblement, tandis que tout ce qu'il aurait voulu dire le fuyait.
*"Kev"... En plus, il y en a un troisième.*
Au quotidien, il devait déjà se battre pour trouver sa place entre deux frères que tout le monde confondait. Trouver sa place à lui au milieu d'un cortège de petits amis hypothétiques était au-delà de ses propres moyens.
- Quelque chose ne va pas ?
Il lui était arrivé de se sentir mieux.
- Ca va.
Toutes ses ripostes s'étaient faites la malle. Celles sur les valeurs ringardes de la famille qui étaient les siennes. Celles sur Kevin qui n'était pas fait pour elle, de manière évidente. Celles sur le choix de passer ses soirées avec qui il en avait envie et qui n'appartenait lui. Celles, égoïstes, sur son droit de jouir du temps passé avec Sakura et Toni, droit qu'il s'apprêtait à lui refuser à elle. Celles sur l'amour-pot-de-colle qu'il ne supportait pas. Aurait-il été une fille qu'elle n'aurait pas songer un seul instant à prendre de la distance. Tous ces mots qui ne franchiraient pas le barrage de ses lèvres. Les garder sur le bout de langue et ravaler le tout comme une pilule indigeste. Ca lui resterait un temps en travers de la gorge mais, comme tout, ça finirait bien par passer.
- Ok.
C'était la seule conclusion potable qu'il avait à donner face à l'exposé de Toni, sans partir dans des délires égocentrico-possessif.
– Je suis crevé.
A même pas huit heures du soir...
- Je vais rentrer, je crois.
Sans brusquerie, il se détacha d'elle. Le sourire qu'il lui adressa était crispé. Avec un peu de mauvaise foi, on pouvait le mettre sur le compte de sa prétendue fatigue.
- Je te souhaite bonne chance avec... euh...
Elle comprendrait très bien. Et ça ne regardait que lui si ses mots lui écorchaient la bouche. Il lui tourna le dos pour s'éloigner en direction du château. Ca allait être sympa de tomber sur la réunion "fraternité O'Brian" si ses frères n'avaient pas encore quitté la salle co. Une petite baston lui passerait les nerfs. Deux pas plus loin, il se retourna, rassemblant toute la bonne humeur à disposition dans ses réserves pour paraître cool et décontracté:
- Tu n'auras qu'à m'envoyer Thémis par hibou spécial. pas la peine de gâcher tes vacances pour moi.
*Evite de m'oublier trop vite.*
C'était une impression ou un soupçon de ressentiment avait réussi à se glisser dans sa voix? Une impression, très certainement.
Dès qu'il fut hors de vue, Jörgen se laissa glisser contre le tronc d'un arbre, essayant de mettre le doigt sur la raison exacte de la rage mélancolique qui s'était installée au creux de son estomac. Il resta un long moment immobile avec l'écorce de l'arbre pour seul contact avec la réalité. Toutes les aiguilles alentour avaient été réduites en miette quand il se releva, sûr ni de sa décision ni de rien. Ce qui ne l'empêcha pas de faire demi-tour, hésitant entre les deux espoirs qu'elle soit restée sur place et qu'elle ait désertée. Quand le ru fit entendre sa musique de manière intelligible, il lança un - Toni? hésitant. Puis:
- Qu'est-ce que tu veux faire pour notre dernière soirée?
Son regard parcourut l'espace alors que la possibilité de ne pas la trouver seule l'effleurait seulement. Il aurait l'air d'un troll fini, les bras ballants. Il avait l'air d'un troll fini, de toute façon, à parler dans un vide peut-être total. Même si le prof de Botanique les encourageait à "parler" aux plantes, leur demander le programme de la soirée n'était sans doute pas très académique.
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Dim 4 Oct - 16:55:30
Toni était tellement habile pour le mensonge qu’elle s’était emmêlé les pinceaux et avait remplacé Romeo par Kevin, le garçon qui était venu les interrompre un peu plus tôt. Elle se rassura et assuma que Jörgen ne s’était aperçu de rien. Dans le pire des cas, il songerait qu’elle avait fait un lapsus. Si elle savait qu’il pensait qu’elle était sur trois coups en même temps ! Ils n’auraient néanmoins pas le temps d’en discuter car Jörgen venait tout simplement de...
- Fuir... il m’a planté, n’en revenait-elle pas.
Il lui avait donné Thémis en lui souhaitant bonne vacances. Il lui avait souhaité bonne chance avec "euh." Lequel c'est ça "euh" ?
La forêt se fit silencieuse. Puis soudain, ses bruits devinrent vite angoissants. Toni ne bougeait pas. Elle était restée debout avec la même rigidité dans laquelle Jörgen l’avait...
- Abandonnée... il m’a abandonné, murmura-t-elle.
Non, Toni. C’est l’inverse, lui rappela une petite voix qui s’appelait conscience, c’est toi qui l’as abandonné la première. Tu as eu ce que tu voulais : l’éloigner, alors, qu’est-ce qui ne va pas maintenant ?
"Rien ! Mais rien ne va !"
Sa poitrine se serra et pour calmer son angoisse elle caressa la pierre de lune qui lui sembla plus lourde que d’habitude. Elle prit ses chaussures à la main et cala Thémis dans son baluchon pour commencer à marcher. Mais elle n’avait pas envie de voir les autres. Elle n’avait pas envie de supporter les questions de ses copines ou de Japhet. Comment expliquer aux autres qu’elle rentrait si tôt et seule de sa soirée de fin d’année ?
Trop loin déjà, elle ne fut pas là pour entendre la question de Jörgen. Elle prit par la rivière, l’eau fraiche la détendrait. Elle se rendit compte après quelques minutes que la lourdeur sur sa poitrine s’était transformé en plomb sur ses joues. Elle pleurait comme on pleure après une rupture.
- Ce qui fait mal maintenant me rendra plus forte un jour, essaya-t-elle de se convaincre en répétant cette petite maxime en boucle.
Elle marcha longtemps en remontant le cours de l’eau. A aucun moment elle n’imaginait que Jörgen était resté près du lieu de baignade, derrière un tronc. Pour elle il était retourné dans sa salle commune pour dormir. Il était fatigué. Elle n’en avait rien cru mais, par amitié, elle avait fait semblant.
Elle arrivait à une petite cascade d’un mètre où l’eau se jetait dans une sorte de cuve naturelle de trois ou quatre mètre de circonférence. Elle sortit de l’eau et dégringola le long de la butée pour aller mettre les pieds dans ce bain naturel.
Elle ne pleurait plus mais elle ne se sentait pas super bien. Ca passerait. Dans l’eau tout passait. Insouciante et en chantonnant à tue tête comme elle faisait toujours pour se défouler, elle retira sa robe et la pendit à un arbre qui penchait maladroitement sur le bord rocailleux de la cascade. Elle sortit Thémis de son baluchon et se baigna avec lui. Elle avait besoin de quelqu’un... une personne qui lui ressemble et qui ne lui fasse pas regretter ce qu’elle avait fait. C’était un pécher de mentir. Elle en était persuadée. Mais en y réfléchissant, après la réaction de Jörgen, elle n’était pas la seule à mentir. Il mentait lui aussi...
Spoiler:
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Jeu 8 Oct - 8:47:17
Encore aurait-il mieux valait s'attendre à rien parce que, justement, rien ne l'attendait. Un grand rien bien vide. Il lui semblait entendre sa voix revenir en écho. Dernière soirée... Toni... ce que tu veux faire... dernière soirée.... La solitude le frappa de plein fouet, comme rarement. Il n'avait jamais vraiment été de ceux qui cherchaient la compagnie à tout prix, appliquant sans le savoir le "mieux vaut être seul que mal accompagné". La vérité était plutôt qu'il était difficile dans ses goûts et que ceux qui avaient l'heur de lui plaire se comptaient sur les doigts d'une main gauche. Et, pour le coup, il n'y avait plus personne.
*Je l'ai bien cherché.*
Si ça avait un moustique, il aurait pu le chasser. Si ça avait été un sortilège, il aurait pu contre-attaquer. Si ça avait une pensée, il aurait pu argumenter avec lui-même. Mais ça n'était qu'un pressentiment. Le pressentiment, diffus, que son départ avait sonné le glas de son amitié avec Toni. Il avait fait l'imbécile et il en paierait les conséquences.
*Bouse bouse bouse.*
Conjugué à tous les temps de tous les modes. Ce qui ne le conditionnait pas exactement aux "alors, comment c'était?" et encore moins à toutes les plaisanteries plus ou moins douteuses qu'allait lui servir la fraternité O'Brian sitôt un pied posé dans la salle commune. Pas la peine d'espérer un mieux du côté des tentes où s'amassaient les élèves. S'il n'aimait pas la foule, ce soir constituait un summum. Il hésita à rejoindre son arbre mais y renonça. Il ne supporterait pas l'inactivité et s'en prendre à un arbre de la lisière de la forêt interdite était toujours jouer à quitte ou double. On ne savait jamais si le sequoia ou le sapin ne vous rendrait pas coup pour coup. Restait l'errance au programme. C'était une activité comme une autre. L'errance au pas de course aurait le mérite de le défouler. Un peu.
Il déboutonna le haut de sa chemise pour respirer à peu près normalement. Courir et ne plus s'arrêter. Courir jusqu'à l'air lui brûle les poumons. Courir à s'en exploser le coeur.
Il se prit quelques branches mais elles ne firent que renforcer sa détermination. Si on pouvait encore parler de détermination. C'était juste ne plus penser, ne plus sentir. C'était retomber dans une habitude et sa sécurité.
Courir encore, courir toujours jusqu'à s'écraser contre un arbre quand on n'avait plus la force d'avancer. Et rester là, à écouter le vacarme de son souffle se calmer peu à peu. Combien de temps avait passé? Une demi-heure? Une heure? Plus? Moins? La nuit commençait juste à tomber.
Quelque chose craqua, un peu plus loin et lui fit tendre l'oreille. Au milieu des bruits (non)familiers de la forêt, lui parvenait un son à la fois étranger et connu. Une voix pour être exacte. Une voix, à moins d'être devenu fou en l'espace d'une heure, qu'il reconnaissait. C'était presque un petit Poucet musical. Une note, un pas de plus en avant jusqu'à la cascade, Toni et Thémis.
De prime abord, c'est la beauté, la pureté naturelle de la scène qui l'arrêta. C'était juste... parfait. Bizarrement, il lui fallut un temps de plus pour prendre conscience que Toni avait abandonné un peu plus loin. Elle était de dos. Son regard glissa sur son dos jusqu'à la naissance gracieuse de ses hanches avant qu'il ne se force à se détourner. Il n'avait vraiment pas besoin de se découvrir voyeur, en plus, ce soir.
Tournant pudiquement le dos, il se racla le gorge.
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Dim 11 Oct - 19:10:13
Le bruit de la cascade masqua les craquements des branches. Elle n’entendit pas qu’on arrivait. Mais elle le comprit quelques secondes avant d’entendre un raclement de voix en regardant le visage de l’enfant. Dans ses bras, Thémis rayonnait de nouveau. Quelque chose le rendait heureux et le rassurait. Son visage poupon constellé de gouttes d’eau ne s’était pas défait de la mélancolie qui colorait ses yeux noisette depuis que Jörgen avait disparu. Mais, soudainement, juste avant que quelqu’un fît connaître sa présence, Toni avait compris ce qui rendait sa joie de vivre au nourrisson qui ressentait tout. Le toussotement ne fit que confirmer. Jörgen.
Thémis ouvrit grand sa bouche et l’une de ses mains vint taper frénétiquement contre la mâchoire de Toni. Avec sa maladresse de bébé, il voulait lui témoigner sa joie de retrouver la moitié manquante nécessaire à son équilibre. Ses rires chevauchèrent le nocturne pour aller embrasser la présence tutélaire. Il gigotait dans les bras de Toni qui s’étonnait toujours de la force que les petits êtres pouvaient développer sans s’en rendre compte. Il poussait sur ses jambes et mimait son envie d’être maintenu debout pour regarder par-dessus l’épaule de la jeune fille.
Toni se tourna en tenant Thémis contre elle. Elle lui donna la vue qu’il désirait. Celle du garçon blond caché dans la nuit. Il leva ses mains vers lui. La lune vint caresser ses bras potelés. Toni aurait juré que sans qu’elle s’en aperçoive, l’enfant avait encore vieilli. Il gazouillait et poussait des cris aigus. Sa sérénade ne s’arrêterait pas tant qu’il n’aurait pas rejoint Jörgen.
Comme elle ne pouvait pas se permettre de montrer la même joie que Thémis (bien que ses rougissements et ses yeux devaient illustrer le contraire), elle se contenta d’approcher du bord. Elle tendit Thémis au-dessus de sa tête pour le tendre à Jörgen :
- Il ne tiendra pas un été sans toi… et, à vrai dire, moi non plus.
Elle lui laissa Thémis et retourna dans l’eau, loin, loin du bord.
Quand elle se sentit assez loin de Jörgen et de la lumière de la lune, enfoncé dans l’ombre et ses recoins, elle lui dit assez fort pour que le bruit de la cascade ne recouvre pas ses paroles :
- Jörgen O’Brian… Jörgen O’Brian ! Si tu m’aimes, descend dans l’eau. Je ne te demande ni baiser, ni parole, ni promesse… juste viens dans l’eau et je saurai. Pour le reste… on verra plus tard.
Thémis était redevenu très calme. Toni l’était tout autant. Le fuir était inutile. Ce qui faisait mal maintenant et qui la rendrait plus forte plus tard n’était pas le fuir… elle se trompait depuis le début. Ce qui ferait mal était que son amour reste sans réponse. C’était ça qui la tourmentait. Elle avait moins peur de perdre Jörgen pour toujours que de comprendre un jour qu’il ne l’aimait avec le même amour qu’elle l’aimait. Et, comme elle venait de le réaliser, elle n’avait plus peur de rien. Elle se sentait sereine et forte car, contrairement à ce qu’on pensait, on n’avait jamais peur de se qu’on osait regarder en face. On n’avait peur que de ce qu’on fuyait, ce à quoi on tournait le dos sans savoir ce que c’était et qui nous hantait et courait après comme un épouventard qu’on n’aurait pas envie de combattre. Toni ne voulait pas être hantée par un regret qui la blesserait plus fort et plus longtemps que n’importe quelle déception.
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Jeu 22 Oct - 15:37:50
Le premier pas dans l'eau de Jörgen fit naître un tel sourire sur le visage de Thémis qu'il se demanda comment il aurait pu hésiter. L'enfant avait cessé ses manifestations vocales de bonheur pour dévisager le avec des yeux attentifs. On ne pouvait ni mentir ni se détourner d'un tel regard, quand bien même il était beaucoup trop mature pour un être de cet âge. C'était une des choses étranges (en dehors de son existence même) à propos de Thémis: cette multiplicité de ses facettes, dans un mélange de pureté, d'innocence et cette maturité qui en faisait un être exceptionnel. Bien ancré au creux de ses bras comme on essaye de s'accrocher à une certitude, Thémis le fixait donc, dans un silence plein d'approbation. L'espace d'un instant, la pensée que le petit garçon sache mieux que lui ce qui était bon pour Jörgen le traversa. Elle s'évapora rapidement, avant même qu'il eut le temps de la trouver étrange.
- Je ne suis pas sûr que...
Sûr de rien, en fait. Ca ne l'empêchait pas d'avancer. De fait, la seule certitude qu'il avait était celle de ne pas vouloir, de ne pas pouvoir faire demi-tour. Il avait eu le goût de ce demi-tour-là et ne voulait plus y goûter.
- Je ne veux pas que tu...
De l'eau jusqu'aux hanches, Jörgen s'arrêta soudain. Dans toute l'étrangeté qui baignait sa vie depuis l'escapade de Paris, la seule qui lui sautait vraiment aux yeux était celle de vouloir expliquer quelque chose qu'il ne comprenait ni ne cernait lui-même.
- Je veux dire que je...
La bouse soit des mots. Exprimer des choses simples, déjà, au quotidien, ça n'était pas son fort. Alors, dans le cas présent, il partait avec un sérieux handicap.
- C'est juste que...
De mieux en mieux. A lui qui était déjà dans sa peau et dans sa tête, ses tentatives d'explication sonnaient comme des excuses piteuses, alors, qu'est-ce que ça devait être pour elle? Dans ses bras, Thémis continuait de l'observer, avec au fond des yeux, comme un encouragement. L'enfant appuya sa main contre sa poitrine comme pour l'aider à en faire sortir les mots. Peine perdue.
Pas sûr d'être ce qu'elle attendait de lui. Ne voulait pas qu'elle s'imagine qu'il était autre chose que ce qu'il était. Dire qu'il n'était pas la meilleure option. Pas sûr de lui-même, de ce qu'il voulait. De ce qu'il sentait. Perdu en pays incertain. C'était juste que...
- J'ai besoin que tu sois là.
Plus qu'un simple envie. Une nécessité. Qu'il ne pouvait pas s'avouer. Qu'il n'osait pas s'avouer. Et qui le mettait dans un sérieux pétrin.
Jörgen resta là, crispé, certain de s'être planté. D'en avoir trop dit, ou pas assez, ou pas comme il fallait.
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Dim 1 Nov - 12:03:12
- Je ne suis pas sûr que...
"Pas sûr de quoi ? pas sûr que quoi ? Qu’ici, tu sois à ta place ? Que tu sois celui qu’il me faut… ? Que je sois celle qu’il te faut ? Que tu doives continuer d’avancer ?... pas sûr de quoi ? Dis-le, dis-le..."
- Je ne veux pas que tu...
"Te fasses des idées ? Penses que je t’ai ? Tu ne veux pas que je quoi ? m’attende à des miracles ?"
- Je veux dire que je...
"Tu ? Tu es perdu ? Tu es désolé ? Tu es content d’être là ? Que tu n’es pas le meilleur ? Mais tu n’es pas le pire, non plus. Tu es le juste pour moi..."
- C'est juste que...
"Moi aussi, c’est juste que."
Avant, elle aurait donné n’importe quoi pour obtenir les mots cachés au bout de ces trois points de suspension mais aucun mot ne surpasserait cet acte. Il la rejoignait dans l’eau et c’était tout le symbole qui écrasait les incertitudes. On n’était jamais sûr de rien mais il fallait quand même le faire, avancer, essayer, se jeter à l’eau…
Lorsque le Poufsouffle termina enfin une phrase et arriva face à Toni, Thémis était d’un calme olympien. Il regardait Jörgen avancer doucement. Toni fit le dernier pas. Son visage était rassuré, apaisé, rayonnant. Elle n’avait pas envie de se demander si Jörgen comprenait réellement ce que symbolisait pour elle son entrée dans l’eau. Elle pensait avoir été claire: "Si tu m'aimes, descends dans l'eau."
C’aurait été sous-estimer sa compréhension de la situation et de ses sentiments. Même s’il ne parvenait pas à mettre les mots sur ce qu’il se passait, elle savait que, quelque part, au delà de l’intellectualité, son cœur, lui, savait mieux que Jörgen.
Elle lui sourit. Un sourire heureux était la meilleure réponse à apporter à sa dernière confidence. Elle aussi elle ressentait comme un besoin vital sa présence auprès d’elle et même au-delà. Mais ils verraient plus tard. Maintenant, ce qui comptait, c’est qu’ils savaient et qu'ils savaient tous les deux que l’autre savait. Ensuite, les problèmes techniques, les autres, la vie, ça s’aviserait en fonction de ce choix : se jeter à l’eau.
Comme la place dans les bras de Jörgen n’était plus libre mais qu’elle était prise d’un insatiable besoin de le prendre dans ses bras pour lui communiquer… pour lui montrer que… pour qu’il comprenne qu’elle… oh ? Elle était aussi atteinte du syndrome du « Mais-quel-mot-mettre-dessus ? » La Gryffondor contourna Jörgen et Thémis pour l’enlacer, calée contre son dos. Elle serra ses bras autour de Jörgen et parvint à refermer le cercle en reposant ses deux mains sur Thémis.
Fin de la première journée.
Jörgen O'Brian ❧ Inactif
Messages : 67 Date d'inscription : 31/07/2009 Age : 32
Sujet: Re: Le début et la fin Ven 13 Nov - 15:43:04
Le deuxième soir, ils se mêlèrent aux autres. C'était ce que Toni voulait. Dans un sans, c'était ce qu'il désirait aussi. La soirée de la veille et son dénouement inattendu l'avait laissé passablement emprunté et mal à l'aise. Il avait du mal à se repérer entre les trop et les pas assez, entre les doutes et les évidences. Sa propre tête était un beau bazar dans lequel la fatigue l'empêchait d'y mettre de l'ordre.
Se présenter en société lui avait paru la meilleure idée sur le moment. Les aveux de la veille, même informulés, étaient trop neufs pour qu'ils osent, pour qu'il ose l'affichage officiel, même si Jörgen n'avait pu s'empêcher une main jalousement posée sur l'épaule de Toni. Thémis dormait dans sa poche sous sa forme de pierre et la mémoire de son sourire éclatant était le rappel (comme s'il en avait besoin)que son choix était le bon. Quand bien même, il ne voyait plus cela comme un choix mais comme une évidence.
Au milieu de la foule, alors que la fête battait son plein, Jörgen se surprit à observer Toni, immobile, un sourire aux lèvres. En fait, depuis vingt-trois heures et des poussières, il passait son temps à sourire, tout en évitant la compagnie d'autrui et, par là même, les questions. Il avait échappé à la perspicacité de son frère et comptait bien s'en tenir là.
Un peu plus tard, il l'avait amené danser. Parce qu'elle aimait ça. Parce que c'était une excuse innocente de la toucher et de la garder près de lui. Parce qu'il aimait la fierté imbécile qu'il ressentait à l'avoir juste à lui. Il lui écrasa deux fois les pieds, fit quelques faux pas mais elle se contenta d'en sourire. La chute de Siegwart et sa partenaire sur eux sonna le glas de la partie "danse", et Jörgen se retrouva aussi emprunté que précédemment. Toni le tira par la main jusqu'à la fête foraine. Pêche aux boobrions (le petit des boobries et Toni qui lui enseigna que la version moldue - la pêche aux canards- était beaucoup moins amusante puisque les oiseaux n'y bougeaient pas et étaient incapables de s'en prendre aux joueurs; tir de fléchettes magiques; etc. Le Poufsouffle se trouva plus détendu qu'il n'avait jamais pensé l'être et retrouva cette complicité qui avait été la leur jusqu'aux événements de janvier.
Ils regardèrent une pluie d'étoiles filantes qui fit briller les yeux de la Gryffondor avant qu'il ne la raccompagne jusqu'à sa salle commune où il la serra brièvement contre lui avant de lui donner rendez-vous le lendemain.
~~~
Coucher tard, lever tard. Il y avait un proverbe qui ressemblait à ça. Pas très frais, Jörgen erra dans son dortoir, malheureusement trop conscient de ce qu'il avait à faire. Trouver Sakura. Et expliquer ce qu'il ne s'expliquait pas lui-même. Il avait fait des tentatives de mini-discours mais aucun des mots qu'il avait trouvé face à son porridge ne rendait grâce à la réalité. Le moment n'avait pas été agréable, loin s'en faut. Les "au revoir" de ce genre ne sont jamais faciles. Il tenta de l'oublier en rejoignant ses frères dans une expédition au sein du château. Au détour d'un couloir, il croisa Toni.
- "Nuit Blanche pour notre dernière soirée ? On trouvera bien le moyen de se retrouver à la nuit tombée..."
Le temps d'acquiescer, elle avait déjà disparu, sans qu'il sache qu'elle l'avait fui, entre dégustation intensive de tout ce que la fête proposait de nourriture et baignade collective dans le Grand Lac. Pour une petite gêne sur laquelle elle ne mettait pas de nom. Sans doute aussi par peur de n'avoir pas la force ni le courage de faire ses bagages... malle fermée est trop égal à départ confirmé. Elle aurait voulu croire que Poudlard, comme ça, la fête, pas de cours, ça pouvait durer toujours... sans valise. Mais comme ça n'est pas le cas et que le réel se rappelle à eux à chaque fois qu'ils voient leurs camarades rassembler leurs affaire, Toni avait finalement fermé sa malle.
- Même pas la peine. On ne dit rien.
Ceci en réponse à ses frères qui avaient commencé qui à ricaner, qui à interroger.
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Le troisième soir. Le troisième soir, Jörgen fut pris d'une appréhension bizarre. Le dernier soir. Un goût de pas envie, de fin précipitée à laisser s'étirer.
Ils s'étaient retrouvés, un peu loin de la fête. Pas le goût de danser. La musique était moins sympa, ce soir. La fatigue du troisième jour, peut-être. Ils avaient parlé, surtout Toni. Dans un déclic que Jörgen ne s'expliquerait sans doute pas, ils s'étaient défiés et avaient volé des instruments au groupe. Ils s'enfuirent en riant comme des gamins, fiers comme des paons, direction la forêt. Elle posée sur une souche, lui assis par terre, ils gratouillèrent la guitare, tirèrent quelques notes de la flûte, à en égratigner les oreilles musicales. Thémis, bon public, riait et gazouillait à qui voulait l'entendre.
Plus tard, ils s'étaient enfoncés dans la forêt, prenant, sans même s'en rendre compte, le chemin de la cascade de l'avant-veille. Ils firent prendre un bain à Thémis, manière innocente de se jeter à l'eau aussi. La scène tourna en éclaboussures en tout genre dont ils ressortirent trempés et qui firent rire l'enfant aux éclats. La soirée touchait à sa fin.
- Tu restes encore un peu?
Elle viendrait. Elle avait promis. Mais pas le lendemain. Pas même la semaine suivante. Elle devait rentrer chez elle. Lui aussi, alors que cette idée ne l'enchantait pas. La famille au grand complet depuis la disparition de Gern, et lui, au milieu de tout ça, sur une autre longueur d'onde. Il ne savait pas exactement ce qui s'était passé à Paris, sauf qu'il ne parviendrait jamais à le regretter, parce qu'il y avait gagné Toni et Thémis. Mais il savait qu'il n'était plus exactement le même. Et que s'il avait une parfaite connaissance des faits, les émotions qui leur étaient liées, qu'il aurait dû ressentir, avaient disparu. La garder encore un peu avec lui, c'était retarder tout ça. Se laisser croire qu'on pouvait arrêter le temps sur un moment de bonheur. Toni acquiesça d'un sourire. Il aurait besoin du souvenir de ce sourire pour affronter le retour à Dublin.
- Viens.
Il s'allongea sous un chêne et l'attira contre lui, jusqu'à ce que sa tête repose sur son torse. Il ne dit rien de plus, posa juste une main sur ses cheveux où quelques mèches rebiquaient pour lui caresser la paume. Il ferma juste les yeux et écouta la nuit. Il se réveilla ainsi, Toni endormie. Il avait passé un bras autour de sa taille et l'avait serrée contre lui. Il la regarda un moment, observa ses lèvres légèrement entrouvertes d'où son souffle s'échappait doucement. Une minute. Cinq minutes. Puis, à contre-coeur, il passa une main sur sa joue pour la réveiller. Il murmura juste un:
- Il faut y aller. Le train part dans une heure.
Elle était peut-être plus prévoyante que lui, mais, pour sa part, ses affaires étaient éparpillées à peu près partout sauf dans sa malle.
Une heure plus tard, ils étaient tous serrés dans un compartiment du Poudlard Express. Ils, c'était ses frères, Toni, Scott, Charles et quelques autres filles. James, à leur arrivée dans le train, se contenta de hausser un sourcil amusé. Tout comme lui, il appréhendait sans doute le retour au sein du clan O'Brian. Contrairement à lui, son frère ne s'en montra que plus extravaguant, de cette fougue amusée qui ne dupait personne mais que tout le monde essayait d'entretenir pour oublier l'arrivée des vacances. Ce furent des batailles explosives, des parties de Bavboules, un combat de chocogrenouille, une comparaison évidente sur les Canons et les Kestrels. King's Cross arriva trop vite. Là, c'était la foule, c'était les parents inquiets, impatients de serrer leurs enfants contre eux, les mères en larmes, les pères droits et fiers, les petits frères et soeurs aux yeux trop grands. A peine sorti du train, alors qu'il tentait maladroitement de concilier la double tâche de garder Toni avec lui tout en traînant ses affaires, Jörgen se fit happer par Katarzyna, sa soeur aînée, qui le serra contre lui avec plus de tendresse qu'elle n'en avait jamais exprimé. Puis, ce fut sa mère, son père, ses jeunes frères. Ce ne fut que lorsqu'il se retrouva avec Sloveig accrochée à ses épaules que le jeune homme prit conscience que la foule l'avait séparé de Toni. Il eut beau la chercher, il ne retrouva sa silhouette nulle part dans la foule.
Toni Scheffer ❧ Inactif
Messages : 70 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 29
Sujet: Re: Le début et la fin Jeu 26 Nov - 19:18:02
Eté. Rentrée.
La tête de Toni dodelinait depuis une dizaine de minutes. Ses paupières se fermaient lentement puis se rouvraient à la moindre défectuosité des rails ou secousse du wagon. Il fallut dix autres minutes avant que sa tête ne tombe complètement, amortie par l’épaule confortable de Jörgen assis sur la banquette tout à côté d’elle. Dans les prémisses de son sommeil, l’inconscience pour alibi, elle entremêla ses doigts à ceux du Poufsouffle. Son corps sembla couler le long du velours de son siège pour s’adapter aux contours du jeune homme et trouver une position confortable afin de rattraper les heures de la nuit qu’ils avaient perdues en bavardage.
Dans la rêverie qu’elle fit, elle embellit son arrivée à Dublin pour la rendre moins épouvantable. Elle rêvait souvent ces dernier temps mais, à son réveil, ne lui restaient que quelques images subreptices au bout des yeux et le sentiment moelleux que c’avait été un bon rêve. Parce qu’elle ne rêvait que de lui. Ses anciens cauchemars l’avaient quitté. En songe, désormais, elle revivait ses instants préférés de la journée ou rajustait les petits ratés qui l’avaient exaspéré.
Début août, quand son train arriva à Dublin, elle n’avait à la main qu’une petite valise à roulettes - l’objet attira plus tard les convoitises de l’attachante famille sorcière qu’elle allait visiter. Juchée sur son bagage, elle attendit longtemps que la famille O’Brian vienne la chercher à la gare. Très longtemps. Au bout d’une demi-heure, la gare commença à se vider, le ciel s’assombrit, les âmes se firent plus rares. Inquiétée, elle aurait bien aimé pouvoir passer un coup de fil à ses hôtes mais le téléphone portable était un outil inconnu du grand public sorcier. Peut-être leur était-il arrivé quelque chose ? Peut-être l’avaient-ils tout bonnement oublié ?
Elle patienta encore une heure avant de méditer l’idée d’appeler sa mère pour lui expliquer la situation. Déjà que Jean n’avait pas été enchantée à la perspective de savoir sa fille unique passer le mois d’août chez un garçon, si en plus elle apprenait que le garçon en question l’avait abandonné - ou pire, oublié - en plein Dublin, ça n’arrangerait pas les choses. Elle meuglerait qu’elle avait eu raison de se méfier de lui et Toni, en plus d’endurer ses « je te l’avais dit », devrait faire le trajet en arrière sans même avoir revu Jörgen.
Que se passait-il, bon sang ? Où était-il ?
Abattue, la petite anglaise sortit le billet de train qu’elle avait dans sa poche pour en vérifier la gare. Elle était tout à fait le genre à se tromper d’arrêt. Vérification. Oui. « Dublin. » C’était bien ça. Bien que les O’Brian clamaient toujours qu’ils habitaient Dublin, en réalité, ils vivaient beaucoup plus loin, dans un coin sauvage et naturel habité de quelques maisonnettes sorcières. Jörgen lui avait un jour expliqué que par le sous-sol de leur logement, ils n’avaient qu’à se servir du portoloin perpétuel d’un vieil épouvantail pour se rendre au cœur de la ville, dans le quartier sorcier. Si seulement elle savait où trouver ce quartier sorcier… elle pourrait emprunter un hibou et écrire à Jörgen… qu’écrirait-elle ? « M’as-tu oublié ? »
Le stress d’être abandonnée dans une ville inconnue la gagna de plus en plus. L’attente et la peur lui firent monter les larmes aux yeux. Un employé de la gare vint s’assurer que tout allait bien. Toni mentit. Oui, tout allait bien. L’homme repartit, peu convaincu… si peu convaincu qu’il revint quelques minutes plus tard en lui apportant un chocolat chaud dans un gobelet en plastique. Toni le but, toujours assise sur sa valise à roulettes, la gorge serrée et les yeux rouges. Elle se confia à l’homme qui l’écouta avec mansuétude.
Le chocolat chaud et cette oreille attentive qui lui semblait toute ouverte sur sa détresse lui redonnèrent un peu de baume au cœur bien qu’elle fût incapable de prendre une décision sur ce qu’il fallait faire :
- Ah ! Je m’en souviendrai de ce 3 août ! lança-t-elle par dépit. - 3 août ? s’exclama l’employé de la gare. Mais on est le 2 !
Ouuuh… Toni eut un moment d’hébétude immédiatement suivi par un éclat de rire ensoleillé. Elle se leva de sa valise puis, de félicité et de soulagement, elle prit les mains de l’homme avec chaleur comme pour le gratifier cette heureuse nouvelle :
- Ils ne m’ont pas oublié ! Je suis troll ! - Troll ? demanda le moldu. - Oui, troll ! A côté de mes pompes ! Complètement à l’ouest !
La Gryffondor se décida à appeler à l’aide. Naturellement son choix se porta sur son meilleur ami moldu, Alexandre. Elle lui exposa le contexte. Le pauvre bougre s’indigna de l’inconscience de son amie. Et qu’allait-elle faire ? Et où allait-elle dormir ? Et de rouspéter. Et de questionner sans fin. N’y avait-il aucun moyen de joindre Jörgen pour qu’il vienne la chercher ? Devait-il prévenir ses parents ? Sa mère ?
- Non, surtout pas ! S’exclama-t-elle. N’appelle pas ma mère ! Elle va me prendre la tête… heu… tu peux… attends, je réfléchis… une copine moldue de Poudlard ?… heu… ah non, mieux ! Appelle la famille Cullen, ils n’habitent pas si loin à vol d’oiseau et ils ont un téléphone, demande Japhet, elle contactera Jörgen… Ca risque de prendre du temps mais Jah est très imaginative. Tu me rappelles pour me tenir au courant ?
Un peu plus tard dans la soirée, Toni attendait, recroquevillée dans un fauteuil de la gare, les genoux sous le menton en serrant son téléphone portable qui ne sonnait toujours pas. Cela faisait plus de deux heures qu’Alexandre avait dit que le message était passé... Il n’y avait plus qu’à attendre. Encore. Alors elle attendit.
Cela faisait trois heures qu’elle était coincée dans cette gare. Les derniers trains avaient terminé de cracher leurs derniers passagers de la soirée. Ca allait fermer. Rectification, ça fermait. L’employé philanthrope vint lui demander si quelqu’un viendrait finalement la chercher. Elle ne savait pas… il lui promit d’attendre avec elle dehors mais, pour le moment, la gare devait fermer ses grilles métalliques.
La boule dans la gorge fit son grand retour. C’est alors qu’elle vit sa silhouette allongée, là-bas, derrière l’employé des chemins de fer qu’elle planta in situ. Elle courut à toutes jambes vers lui, lui sauta dessus et déversa un incroyable débit de paroles tout en baisant son visage et ses joues sans aucune pudeur. Elle n’avait jamais été aussi heureuse de le voir. Elle était aux larmes. Et d’apaisement et de fatigue :
- Jörgen !! Je suis désolée ! J’étais tellement pressée de venir que… et je me suis trompée de jour… pendant trois heures, j’ai attendu ! Mais heureusement il y avait du chocolat chaud et Alex et Japhet et le monsieur de la garde là-bas ! Merci monsieur !!! Pis, je pensais que tu m’avais oublié ! Je ne voulais pas appeler ma mère ! J’avais peur, c’était horrible ! Je pouvais pas sortir Thémis ! Tes parents vont dire que je suis folle ! Il est si tard ! Pauvre Thémis ! Je ne pouvais pas le sortir ! Je suis trop contente de te voir ! C’était atroce, horrible, horrible… je pouvais pas croire que tu m’avais oublié.
La tête de Japhet Cullen au milieu des flammes avait quelque chose d'étrange. Certes, pas aussi farfelue que la résolution du patriarche, Sullivan O'Brian, de "ne plus parler Quidditch jusqu'à la fin des vacances" mais suffisamment pour attirer les regards curieux de James, Siegwart et Ernst.
- Jörgen O'Brian c'est toi? - Non, moi, c'est James. - Et moi, Siegwart. - Et moi, jsuis Ernst. - Joooooooooooooooooooooooooooooooooooooooorg! - Y a une fille pour toi.... - ... dans la cheminée.
Le véritable Jörgen qui n'avait pas plus que ça prêté attention à cette nouvelle venue dans les allers-retours quotidiens, rappliqua en râlant doucement. Ses sourcils s'arquèrent à la vue de la Serdaigle.
- Euh? Japhet?
De l'étonnement, Jörgen passa vite à l'inquiétude. Au terme d'une histoire complexe dont les principaux protagonistes étaient un garçon du nom d'Alexandre, un troll, un train et un chocolat chaud, il se répandit en remerciements avant de retrouver son silence habituel, une nuance d'inquiétude en plus. Sans un mot pour quiconque, les sourcils froncés, il se rua vers le sous-sol, ne prenant le temps que de s'emparer de sa baguette.
Dans l'histoire de la course à pied, il y avait beaucoup d'histoire de records. Jörgen venait sans conteste de pulvériser le sien quand il atteignit la gare.
Il n'eut le temps que de capter le regard réprobateur de l'employé de gare avant de serrer fort Toni contre lui, ne parvenant à placer que quelques "Désolé... je pensais que... tu aurais dû... j'aurais dû... c'est génial que tu sois là... désolé...", etc. Mais même les remords n'arrivèrent pas à altérer son sourire. C'était comme s'ils avaient volé une journée au monde. Vingt-quatre précieuses petites heures. Le jeune homme prenait la petite valise en main (elle n'avait que ça? et ces roues en bas, ça servait à quoi?) quand l'employé lui tapota sur le bras, discrètement avant de lui chuchoter:
- On fait pas attendre une fille comme elle...
Finalement, la culpabilité n'était pas si loin.
- Je sais.
Il serrait Toni un peu plus fort contre lui quand ils quittèrent la gare.
Un peu plus tard, toute embarrassée, elle rencontrait la totalité de la famille O’Brian dont aucun membre, prévenu de l'arrivée imminente de Toni, n’était encore couché. Elle n’avait pas imaginé son arrivée comme ça. Dans ses rêves, Jörgen aurait un I-Phone 3GS dernier cri et accessoirisé sorcier !
Déjà, sur le pas de la porte de leur demeure et jusqu'à la fin de la soirée, 33,33% des triplets se ficha d’elle sans réserve. Autant dire que James s’en donna à cœur joie. Jupiter montra moins d’extravagance dans son humour et, quant aux autres, ils parurent plutôt amusés par la situation et ravis de rencontrer une amie de Jörgen. Ils firent très peu cas de son arrivée anticipée bien que celle-ci posa quelques problèmes d’organisation. En effet, l’aînée, Katarzyna, ne devait quitter Dublin que le lendemain soir pour laisser sa chambre à Toni le temps des vacances qu’elle voulait passer avec des amis avant de reprendre son travail.
Alors le premier soir, la Gryffondor partagea la chambre de Solveig, la petite dernière. Solveig avait une magnifique collection de cartes Chocogrenouilles dont Toni fut enchantée de compter plus de 170 pièces… elle avait eu l’honneur de se les faire passer en revue une à une, accompagnée, pour chacune, d’un commentaire expert de la petite fille…
Ce même soir, Siegwart se transforma en super groupie. Tout au long de son séjour, le petit frère suivit la Gryffondor partout où elle allait. Il était fan de sa valise à roulettes, fan de son portable sans réseau, fan de son lecteur MP4 et des minis clips vidéos de groupes moldus, fan de son rire, fan de ses baggy et de ses blagues les plus nulles… Des fois Toni se surprenait à rire pour une bagatelle et elle ne s’apercevait de la discrète présence de Siegwart que lorsque celui-ci décochait un éclat de rire presque immédiatement après le sien. Ce qui la faisait rire le faisait rire. Quand elle n’aimait pas, il n’aimait pas. Quand elle était grognon, il était grognon. Dans tous les cas, elle sursautait quand elle découvrait sa présence : « Qu’est-ce que tu fais là toi ? » demandait-elle. « Bah rien, je te regarde » disait-il heureux. Cet attachement s’avéra très utile, du moins, aux yeux des parents, car lorsque Toni allait aider au rangement de la table avec Ingrid venue faire un saut chez ses cousins pour grossir un peu plus la tribu, Siegwart aidait aussi, très vite secondé par Ernst qui ne voulait pas qu’on gratifie son petit frère plus que lui et, surtout, Toni l’apprit un peu plus tard de la bouche de Siegwart, Ernst se voulait amoureux de la Gryffondor. Un amour romantique et platonique qui n’existait que dans le silence.
Néanmoins, les tâches quotidiennes se faisaient dans les rires et on oublia très vite l’arrivée agitée de Toni. La mère O’Brian, qui avait été plutôt distante et sceptique au début, finit par être conquise par la Gryffondor. Il fallait dire que Toni devait être la seule à pouvoir écouter les longs discours de monsieur O’Brian sans jamais se lasser.
Au début, la jeune fille s’était sentie tout particulièrement gênée d’être au milieu de cette famille à laquelle il manquait un fils et un frère un peu à cause d’elle. Elle était parvenue à faire un deuil de cette journée du Combat Blanc mais, le lendemain matin de son arrivée, lorsque Jörgen et Ernst lui firent faire le tour du propriétaire et qu’ils arrivèrent à la chambre des triplets où Ellesworth était en train de ranger son linge, ce dernier lui jeta un regard sombre qui la pétrifia. Il leur tourna le dos, faisant mine de ne pas les écouter, et continua son activité. Ernst, sur un ton plein de tact et de maturité, expliqua qu’Ellesworth qui partageait auparavant sa chambre avec Gern, avait désormais migré chez les triplets. Le cœur de Toni se mit à battre à gros vrombissements. Oublié toutes les âneries des triplets, les rires et la joie des vacances. Sans un mot, Jörgen lui prit la main pour l’amener dehors, il voyait bien qu’elle n’avait plus le cœur à visiter l’auberge du Icy Frog et le logement de sa famille. Fustigeant ce contact physique qui lui parut outrageant pour son amour inhibé, Ernst maugréa quelque chose mais laissa le duo seul à seul.
En attendant le déjeuner, Jörgen et Toni discutèrent de la façon dont il était bon de se comporter face à cet évènement. Les mots sortirent de travers ou au tiers de leur moitié mais ils arrivèrent à concevoir qu’il fallait laisser plus de temps à Ellesworth pour oublier, ils ne devaient pas se laisser gâcher les vacances pour cela. Le destin choisit beaucoup de choses qui paraissent n’avoir aucun sens au moment où on les vit… mais cela aurait-il eu plus de sens si ce huit janvier c’avait été Toni plutôt que Gern qui avait péri ? Peut-être que oui pour Ellesworth… parfois on a besoin d’un coupable pour mieux supporter les trahisons du sort.
Depuis ce matin-là, Toni se montra très discrète avec lui. Elle n’en rajoutait pas et évitait de penser à son regard mélancolique ou de songer qu’il quittait si vite la table après chaque repas parce que sa présence l’incommodait.
La culpabilité était là, aussi, légèrement sous-jacente, accompagnée de sa fidèle amie la honte, ce matin-là. Jörgen aurait été incapable de se justifier ni même d'expliquer pourquoi. Pourquoi, au réveil, il avait jeté un vieux jean et un T-shirt blanc à chacun de ses deux frères avant d'enfiler la même tenue. Pourquoi il avait pris garde à ce que, ainsi identiquement vêtus, ils descendent tous les trois ensemble et que tous les trois ensemble, ils pénètrent dans la cuisine. Pourquoi il guetta le premier regard de Toni qui se contenta de survoler James puis Jupiter avant de s'arrêter sur lui, rien que sur lui, pour lui sourire. En revanche, il savait très bien pourquoi lui sourit en retour et pourquoi ce regard et ce sourire seraient un souvenir précieusement conservé.
Ainsi allaient les vacances : James taquinait son frère, Sieg’ renchérissait mais restait un fidèle fan de la Gryffondor, Ernst, toujours serviable, ressassait son amour contrarié, Ingrid jouait les confidentes, Solveig était toujours partante pour tout du moment que c’était avec les grands, Ellesworth faisait des efforts mais la présence de Toni l’ennuyait, monsieur O’Brian ne tarissait jamais de sujets de conversations avec la Rouge qu’il questionna très peu sur sa relation avec son fils (conversations en grande majorité quidditchiennes), madame O’Brian se montra un peu plus difficile à convaincre mais elle fut la première à aider Jörgen et Toni à trouver un bateau à voile pour leur virée marine.
Rêver des vacances, c’était les prolonger un peu… Mais soudain le Poudlard Express freina brutalement. Toni leva la tête brusquement, se cognant dans le menton de Jörgen :
- Aïe ! Qu’est-ce qu’il se passe ? demanda-t-elle en se frottant la tête.
Jörgen ne répondit pas, il regarda à travers les rideaux de la cabine. Un arbre était tombé sur les rails.
- Heu…
Eloquant.
Toni s’étira et sourit :
- J’ai fait un super rêve… je rêvais de mon arrivée à Dublin ! Tu avais un téléphone portable, se mit-elle à rire. Tu l’avais enchanté pour le transformer en GPS. - En gépéhesse ? - Oui ! - Ah ? C’est quoi un Gépé…
Le train se remit en marche.
- Jörgen, je ne sais pas si je te l’ai déjà dit mais j’ai beaucoup aimé ces vacances… j’espère qu’un jour, on inversera… ça risque d’être moins drôle mais on partira avec Alex, il est fasciné par les sorciers. - J’aurais bien aimé le rencontrer… au moins une fois. - Heu, oui… mais il faut lui laisser le temps… je crois que pour le moment, il n’a pas super envie de te voir… il faut qu’il avale la citrouille pour passer à autre chose. Il est du genre possessif.
Sur une rive près de Liffey où, au milieu de l’été, ils avaient passé la soirée à Temple Bar avec tous les O’Brian, la mère de Jörgen avait trouvé un charmant bateau à voile qu’elle avait désillusionné pour l’occasion. Le temps de naviguer hors de la ville.
Toni avait proposé à Jörgen une virée en mer, cachant à peine sa volonté de l’avoir rien que pour elle lors de cette dernière semaine de vacances. De plus, près de l’eau, plus de problème pour laisser Thémis vivre à sa guise. Chose qui avait été particulièrement difficile depuis qu’elle était arrivée, en raison du très grand nombre de regards qui étaient perpétuellement posés sur eux.
A l’annonce de leur envie de croisière, ils durent essuyer une suite de vannes plus ou moins rigolotes de la part de toute la famille. Même monsieur O’Brian abandonna un moment ses discussions fanatiques sur la politique du sport pour envoyer un gentil : « Une croisière en amoureux, c’est d’un romantique inattendu, mon fils. » Ce qui faisait le plus rire Toni était la tête du Poufsouffle à chaque remarque : « Tu vomis pas ton jus de citrouille, hein ! » by Siegwart, « C’est pas sérieux, maman, tu vas pas les laisser partir tous seuls ! C’est un garçon ! C’est une fille ! Et je humpffrefphgyaihdbgjh ! » (By Ernst avant que la main d’Ellesworth vienne interrompre la litanie désespérée de son cadet, « Toni et Jörgen sont dans un bateau, Jörgen tombe à l’eau qu’est-ce qu’il reste ?... » « On veut pas savoir, James… » répondit Jörgen d’un ton déconcerté.
La balade en mer restait un des meilleurs souvenirs de Toni, juste après les cours de cyclisme et l’escapade en vélo avec Jörgen ; il trouvait les vélos « génialissimes » et décida que pour avoir l'air d'un moldu, il fallait savoir pédaler. D'après lui, cela ne devait pas être plus compliqué que de monter sur un balai… La réalité lui prouva le contraire mais quand il eut chopé le coup de pédale, ils purent s’adonner à de longues balades dans la ville, côté moldu.
Sur le bateau, ils parlèrent très peu. Les premiers jours, Toni apprit quelques trucs de navigation à Jörgen. Au bout de trois jours, le sorcier savait parfaitement gouverner et sortir les voiles. Sur le petit pont en bois, ils disposèrent une piscine qui consistait en un grand bac à eau destiné initialement aux produits de la pêche. C’était la piscine de Thémis. L’enfant qui pouvait maintenant se tenir assis aimait qu’on le laissât barboter pendant des heures.
Le Poufsouffle, à grand renfort de magie quand cela devenait périlleux, s’adaptait toujours très bien aux inventions moldues : le liquide vaisselle et l’écran de contrôle firent l’objet d’une très longue discussion.
Le premier soir, Toni éprouva beaucoup de difficultés à s’endormir. Elle se repassait les images de son compagnon de cabine en boucle : Jörgen dans l’eau, Jörgen à la barre, Jörgen qui fait la vaisselle sans conviction, Jörgen et Thémis... Jörgen et le filet de pêche vide... Jörgen, la crème solaire et les coups de soleil... Jörgen entrepreneur qui fabrique un parasol pour Thémis (grand moment), Jörgen mélomane et le lecteur MP4, Jörgen et les tentatives infructueuses pour faire de la sauce pour une salade... Elle tourna sa tête sur son oreiller pour le regarder dormir sur le lit jumeau d’à côté. Il ne dormait pas non plus. Leurs yeux se croisèrent. Un rougissement collectif fusionna soudainement avec leur bronzage. Elle sourit avec gêne, lui souhaita une bonne nuit et se réfugia sous sa couverture morte de honte de s'être fait surprendre à l'observer. Elle finit par s’endormir beaucoup plus tard, songeant que c’était la première fois qu’elle dormait dans la même pièce qu’un garçon.
Le lendemain soir, ce fut le même manège et la même difficulté à s’endormir. C’était très simple. Vraiment pas sorcier. Mais elle se demandait ce qui ne tournait pas rond dans sa tête. Comme la veille, elle essaya de surprendre son sommeil mais lui non plus ne dormait toujours pas. Il avait subitement ouvert les yeux. Il semblait être touché par la même insomnie.
Au deux milles six cents quatre-vingt-treizième moutons, Jörgen ne dormait toujours pas. Comme la nuit précédente. Ces moutons-là avaient, en plus, la drôle de particularité de tendre à l'animagusité. Il ne s'était jamais considéré comme quelqu'un à l'imagination débordante et pourtant, invariablement, Toni remplaçait les moutons sautillants. Il avait pourtant tenté des variations autour du thème principal du saut d'ovins. Il y avait le ballet des moutons, les moutons contre les vampires et tout un ensemble de n'importe quoi. Les cours d'Histoire de Binns qui étaient pourtant reconnus pour leur vertus soporifiques, les récits de son père... Il avait même tenté de s'auto-raconter les vieux contes de Beedle le Barde. Rien n'y avait fait. Sa nuit avait été presque blanche, juste quelques brèves pauses oniriques pour teinter le tout de gris. Il en avait profité pour observer Toni dormir. Pas besoin de s'en cacher, personne n'était là pour intercepter ses regards.
La fatigue entraînait un manque de contrôle ou peut-être était-ce seulement une bonne excuse. On réfléchissait moins, on agissait plus avec ses tripes et moins avec sa tête. Ce qui n'empêcha pas Jörgen de se livrer à un débat intérieur long, complexe et riche en arguments. Entendre Toni se tourner et se retourner dans le lit d'à côté n'était pas là pour l'aider.
Depuis longtemps, déjà, il avait renoncé à mettre des mots sur la relation qu'ils partageaient. Il y avait trop d'étrange et d'inhabituel, d'inexplicable et d'instinctif pour supporter le poids d'une explication. Toni était. Thémis était. Lui-même était. Et tous ensemble, ils étaient. Ca ne gommait pas pour autant les "et si" et tous les "qu'est-ce qu'elle va en penser?" mais ça supprimait tous les modèles sur lesquels s'appuyer pour bien agir. Il ne pouvait se fier qu'à lui-même, aux attitudes de Thémis et aux réactions de Toni pour valider ou invalider ses gestes.
Il avait besoin d'elle, d'une manière qu'il ne comprenait pas, d'une manière qu'il ne s'expliquait pas. Qu'il ne cherchait ni à comprendre ni à expliquer. Comme le reste, ce besoin était là. Il était et ça lui suffisait. Sa présence lui était nécessaire, apaisante et enivrante. Il avait besoin de sa chaleur et d'entendre le rythme de son souffle. Simplement.
Finalement, silencieusement, il ouvrit sa couverture vers elle dans un geste chaste d’invitation à venir le rejoindre. Le cœur de la Gryffondor battit à rompre les océans, Moïse devenait un petit barboteur et la traversée de la cabine pour se faufiler entre les draps du Poufsouffle lui parurent le chemin le plus long qu’elle n’avait jamais parcouru dans son existence. Elle s’allongea en chien de fusil contre lui, il referma le drap sur eux et, tous les soirs, depuis ce soir, s'endormant ensemble, ils purent trouver le sommeil.
Le matin, ils n’en parlaient pas. Elle se contentait de sortir du lit, de prendre la pierre de lune pour aller faire sa toilette du matin à Thémis avant de préparer un petit déjeuner. Le soir revenu, elle se glissait dans les couvertures de Jörgen.
Elle imaginait très bien à quel point, la première fois, seulement lever son bras pour écarter les couvertures avaient dû être pour lui un geste difficile à accomplir. Elle se demandait combien de milliers de réflexions et trituration de neurones cela lui avait coûté. Pourtant, ils n’avaient rien fait de mal... Etre l’un contre l’autre dans un instant aussi calme et privilégié que l’endormissement n’était pas nature à contrefaire le lien insolite qui les unissait. Tout allait de soi et, surtout, plus que jamais, la nécessité d’être semble.
A leur retour à Dublin, Toni avait trouvé le temps trop court. Ils furent accueillis par toute la famille de Jörgen qui, en voyant leurs mines bronzées et réjouies, ne posa que peu de questions sur les bienfaits que leur avait procuré cette petite croisière. De leur côté, ils racontèrent leurs étapes sur différentes petites îles près de la côte et l’apprentissage de Jörgen à la barre.
Déjà, le lendemain après-midi, les vacances se terminaient. Toni rentra chez elle par le train de 17h43. A Londres, avec ses parents, elle en profita pour faire les courses de rentrée en les noyant sous le récit de ses vacances. Son père partagea grassement son enchantement. Sa mère retenait ses questions indiscrètes sur le garçon.
Toni avait laissé Thémis à Jörgen et tous les deux lui manquaient déjà. Par un hibou du soir, elle lui donna rendez-vous au Licky Cauldron. Si cela était possible, la veille du départ pour Poudlard. « ...Une dernière fois, je voudrais qu’on soit tous les trois avant d’être noyés dans la foule, les devoirs, les journées de cours et les choses du quotidien où vous ne serez pas. »
Elle avait écrit « vous », décrivant Thémis et lui, parce qu’écrire « tu » rendait la missive trop intime. Effrayante. Comme l’avait dit la vieille parisienne, cette pierre de lune était le ciment qui reconstruit, qui unit, qui solidifie… Thémis tenait son rôle à merveille : il était le merveilleux et précieux prétexte à se retrouver ensemble en plus d’être à lui seul une source formidable de défoulement pour les sentiments et les actes qu’on garderait pour soi.
Au Licky Cauldron et sur le Chemin de Traverse, ils discutèrent une grande partie de la nuit à essayer de prévoir les nouveautés de la rentrée, à se faire un compte rendu heureux sur leurs vacances ou à discuter de ce qu’ils avaient dû acheter pour la rentrée. Toni prit des nouvelles de toute la famille et confia à Jörgen qu’elle avait emmené dans sa malle le chandelier familial qu’Ernst lui avait offert le jour de son départ afin de le mettre sur sa table de nuit à Poudlard.
Sur le quai du Poudlard Express, Toni ressentait d'ores et déjà la fatigue du voyage. Ils n’avaient que très peu dormi, ivres de profiter de leurs derniers instants de complicité à l’abri des regards. L’arbre qui tomba sur les rails, la tempête soudaine qui immobilisa le train pendant quarante minutes, l’accident du chariot de sucreries que des petits malins enchantèrent… tout ce qui ralentit l’arrivée du train sorcier à sa destination fut pris par Toni comme des actes manqués du destin pour prolonger les vacances au coin de son Poufsouffle.
c'est kitsch mais pour le contexte, c'est génial en plus c'est mon père qui chante...
Spoiler:
Ce titre est extrait de l'album : Le Manteau De Pluie Année de sortie : 1991 | Label : EMI
Sentiment Nouveau
J'avais perdu le goût des choses Sans avoir idée de la cause La naissance des temps nouveaux Me surprit bientôt La poussière au bleu du chagrin S'élevait sur tous les chemins Vous courez comme feu folet Mon âme égarée
Puis il y eu ce sentiment nouveau Ce souffle sur ma peau Le plaisir avec toi Puis il y eu la joie d'être éveillé Par le premier baiser D'une bouche adorée (le plaisir avec toi)
Nous êtions du dernier regain Condamnés à mourir demain Issus du troupeau décimé Promis au boucher Depuis ma tristesse est un monde ancien Un monastère tibétain Une jonque pleine d'oeillets Prête à chavirer
Puis il y eu ce sentiment nouveau Ce souffle sur ma peau Le plaisir avec toi Puis il y eu la joie d'être éveillé Par le premier baiser D'une bouche adorée
Puis il y eu ce sentiment nouveau Ce souffle sur ma peau Le plaisir avec toi Puis il y eu la joie d'être éveillé Par le premier baiser D'une bouche adorée (le plaisir avec toi)