Les chaussettes de l'archiduchesse

❧ Etudiante Messages : 691 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 39

L'un de ces feux clandestins qui en appelaient aux réprimandes du concierge était celui de nul autre que nos deux McEwan. Il fallait bien qu'enseigner apporte quelques compensations. Et, sans fausse modestie, leur brasier valait bien l'officiel. Il était certes plus petit en taille mais d'une intensité redoutable.

'Humph... Cela tient peut-être aux vagues arrangements dont il a été la victime....'

Snifouille. Pauvres petites brindilles et pauvres grosses branches, victimes des maléfices des plus Ecossais des professeurs. Allons bon, ils étaient dans une école de magie, non? A quoi bon être sorcier si ce statut n'a même pas la vertu d'améliorer le quotidien? Alors, oui, Xaël et Mélusine avaient un peu joué de la baguette et leurs flammes n'étaient pas toujours de la couleur réglementaire. Mais, bandes de jaloux, avouez qu'un feu multicolore dont la teinte varie d'heure en heure, c'est tout de même plus original qu'un banal feu de cheminée. La seule hantise de Mélusine était qu'un élève, oublieux de l'interdiction de consommer de l'alcool au sein de l'établissement et un peu trop ivre pour garder contact avec la réalité, ne prenne leur feu devenu vert pour de la poudre de cheminette lancée en plein milieu du terrain de Quidditch et ne se jette dedans en espérant atterrir on-ne-savait-où. Parce que, malgré tout leur génie, le feu des McEwan était un feu ordinaire. Du genre à vous parfumer d'une délicate odeur de poulet grillé si vous y frottiez trop vos plumes.
A bon entendeur....

Leur flambée avait donc élu domicile en plein milieu du terrain de Quidditch. Pour passer une bonne soirée, la sélection du lieu est primordiale. Et, pour l'un comme pour l'autre, le terrain de sport avait l'effet d'une madeleine de Proust et convoquait quantité de bon souvenir. Le responsable du Quid aurait pu râler qu'on abîmait sa belle pelouse. Aurait pu. Ca n'était pas un problème car...

'... la responsable du Quid, c'est toi!'

Oh comme elle adorait ça!
Ils étaient donc, présentement, installés sur l'herbe verte qui se teintait d'éclats dorés sous la lumière conjuguée de la lune et des flammes. Xaël et Mélusine avaient invités quelques amis, histoire d'augmenter le potentiel de réussite de leur soirée. Groupe restreint, cependant: outre eux deux, il y avait Kristin, Emreis, Morgane et Patrick, un type de Moon Shadow que Zyn avait en affection depuis trois ans déjà. A eux six, la soirée promettait d'être inoubliable.

Il n'y avait, au fond, qu'un seul détail pour faire de l'ombre au feu de joie. Les propres chaussettes de Mélusine. Multicolores, elles brillaient dans le noir et se mettaient, de temps à autre, sans raison, à clignoter. L'effet était des plus sympas. Ils avaient tous piqués un grand fou-rire, quand, au moment où ils s'esquivaient du château dans l'obscurité de la nuit d'Ecosse, on ne distinguait plus de leur petit groupe que les tronçons luminescents correspondant aux mollets de Mélusine. Elle-même s'était retrouvée le nez dans l'herbe à trop s'admirer.

"Cookies? Bierraubeurre? Jus de citrouille? [...]"

Aucun doute, la soirée promettait d'être belle.

❧ Professeur Messages : 112 Date d'inscription : 30/07/2009 Age : 36

Une soirée entre McEwan ne pouvait être que délectable, qui plus est quand une perle sertie de saphir était à vos côté. Mis à part le belâtre qui se pavanait aux côtés de sa cousine, Xaël se voyait bien passer les restant de ses jours ainsi, à siroter bièrraubeurre, croquer des cookies, lancer quelques balgues et autres traits d'humour, echaffauder des sorts audacieux et voler quelques baisers à Krystin.

Patrick - non décidément Xaël n'aimait pas ce prénom, ça lui rappelait trop cet évangéliste imbus de lui-même qui avait cru pouvoir réduire la magie à néant - lui faisait trop penser à une sangsue à rester près de Zyn et à rire avec elle (comme tout le monde d'ailleurs, mais n'empêche). En plus son tein un peu trop blafard de ceux qui passent leur vie entre deux murs lui faisait trop penser à un vampire.
Mais le pire de tout, outre qu'il passait son temps avec elle depuis trop longtemps, était qu'il était sympathique. Et en tant que tel, il ne pouvait pas le détester.

Donc, tout semblait aller pour le mieux. Leur feu de sorcier se lêchait les babines en tentant d'attraper le ciel et eux riaient à gorge déployée.

Ils étaient bien loin de se douter de ce qui allait se produire d'ici peu.

Ce fut Krystin qui perçu la première quelque chose qui clochait. Elle posa une main pressante sur le bras de Xaël. Celui-ci mit un petit moment avant de comprendre qu'elle ne quémandait pas un autre baiser et que son regard n'était pas brûlant d'amour mais plutôt angoissé.
Krystin était hypersensitive, un don répandu chez les sorciers... chez certains plus que d'autres.
Morgane s'arrêta aussi de rire. Elle avait perçu quelque chose.

Devant l'expression de ses deux amies, Xaël se concentra sur ses sensations psychiques pour percevoir ce qui clochait.

On aurait dit un froissement de la toile de vie, une fêlure dans l'ordre des choses.
Quelque chose n'était pas à sa place ici.
Quelque chose de sombre et d'implacable.

Le sang de Xaël se glaça et malgré le feu qui continuait sa course vers les étoiles, il se sentit frigorifié.
Il y eut une courte bourrasque qui excita le foyer.
Puis tout sembla s'arrêter.

Surgissant de nulle part, une silhouette encapuchonnée vint de l'obscurité jusqu'à eux.

❧ Etudiante Messages : 691 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 39

Mélusine, qui était certainement la moins sensible du groupe (ou alors, qui s'en cachait le mieux) fut la dernière à s'arrêter de rire et de boire. Son instinct, tellement adepte de batailles diverses et variées, auraient pourtant dû la prévenir. Eh non. On pouvait déjà distinguer le bleu des yeux de l'inconnu quand elle daigna enfin tourner le regard vers lui.

Un frisson lui remonta le long de l'épine dorsale.

Une chose était certaine: elle ne s'était jamais frottée à un individu de son espèce. Toutes ses précédentes joutes, tous ses anciens ennemis lui parurent soudain bien fades face au nouveau venu. Puis, sans qu'elle puisse se l'expliquer, l'impression se dissipa comme la fumée par un peu de vent. elle aurait dû se souvenir qu'il n'y avait jamais de fumée sans feu.

'Drôle de look...'

Elle adorait. Classe. Complètement décalé et obsolète (même les vieux grincheux du Ministère n'osaient plus arborer ce genre de tenue). Et surtout, d'un rouge vermillon qui tenait à l'incarnat. Quiconque s'habillait de celte couleur méritait soit son amour le plus instantané soit sa haine la plus hautaine. Elle ne parvenait présentement pas à se décider. Le regard de l'anonyme l'hypnotisait à moitié. Il avait quelque chose de franchement pas normal. Peut-être était-ce dû au fait qu'elle n'aurait pas dû être à même de percevoir ses yeux sous la capuche qui l'abritait. Sortant provisoirement de sa transe, elle osa, la première, lui adresser la parole:

"Salutavous! Vous cherchez un peu de compagnie?"

Patrick, ce brave Patrick, renchérit dans un élan de sympathie spontanée:

- Oui, joignez-vous donc à nous!

Et chacun d'y aller de son petit mot de bienvenue tandis que l'étranger demeurait face à eux, incrédule et silencieux, les jaugeant du regard. Du moins, de ce que l'on pouvait en dire.

"Youhouuuuuuuuuuuum? Vous parlez anglais? Venez donc vous asseoir! Sinon, y a le feu officiel, un peu plus loin, si jamais on vous fait peur."

- Vous croyez vraiment pouvoir m’impressionner, tous autant que vous êtes?

Le ton était clairement dédaigneux mais aussi, étrangement troublant.

- Amusant.

Un autre de ces moments où le silence envahit l'atmosphère. Tous autant qu'ils étaient demeuraient inactifs. Eux assis. Lui, debout, à une distance respectable. Mélusine finit par déglutir le morceau de muffin qu'elle était précédemment en train de mâchouiller et se lança:

"Si vous n'avez pas peur, approchez donc!"

Foi de McEwan elle n'allait pas se laisser impressionner par un drôle de gugusse en redingote de velours.

❧ Professeur Messages : 112 Date d'inscription : 30/07/2009 Age : 36

Xaël essaya de faire tout les signes possibles et inimaginables à sa cousine. Peine perdue. Non seulement elle ne chercha pas à se fondre dans le paysage mais qui plus est, elle invita l'inconnu à se joindre à eux. En toute autre occasion, il aurait approuvé sinon appuyé les choses dans ce sens, mais l'homme qui venait à eux le rendait mal à l'aise.

Au fur et à mesure qu'il s'approchait du camp improvisé, il révéla les détails marquants de sa personne. Outre sa voix traînante et sans appel, sa démarche avait la lenteur calculée de celui qui se donne à voir pour mieux en imposer. Derrière un capuchon noir, des cheveux mi-long auburn encadraient un visage d'une beauté à couper le souffle. Et bien que Xaêl ne fut point trop sensible à la beauté incarnée dans la gente masculine, il ne pouvait pour autant la nier. Mais c'était une beauté froide, une beauté dure, comme une étoile de givre qui vous glaçait le coeur.

Le jeune professeur commençait vraiment à se sentir très mal et visiblement il n'était pas le seule. Krystin lui serrait la main à lui broyer les os et Morgane plissait des yeux comme à chaque fois que quelque chose l'éprouvait.

La réplique de Mélusine sonnait encore dans le vide quand ce visiteur impromptu daigna enfin s'arrêter à leur niveau. Les flammes renvoyaient un reflet inquiétant dans son regard et prenait une lueur verdâtre qui rappelait un peu trop l'un des fameux sortilèges impardonnables.

L'homme marqua une pose et sortit une main de sous sa cape.
Pas de baguettes mais Morgane poussa un petit cri, ce qui acheva de mettre les nerfs de Xaël en pelote.
L'incconu s'humidifia ses doigts et s'appliqua à lisser son sourcil gauche.

- Pathétique...

Il continua à les dévisager un moment comme s'il évaluait un troupeau d'âne...
... et qu'il cherchait un alezan...

Le groupe sortit peu à peu de sa torpeur lrosque Krystin donna un léger coup de coude à Xaël en murmurant :

- Ca doit être un nouveau professeur.

Sûrement un arriviste dans ce cas... de ceux qui aiment en imposer sans avoir le moindre talent. Sauf que lui puait la magie (moire dirait-on) à plein nez.
Peut-être affichait-il cet air supérieur car il pensait avoir coincer une bande l'élèves récalcitrants qui ne tenaient pas compte du couvre-feu ?

- Hum, bonjour. Je suis le professeur de Runes, Xaël McEwan.
Histoire de dissiper les malentendus.
"Et vous êtes ?"

❧ Etudiante Messages : 691 Date d'inscription : 28/06/2009 Age : 39

Pour ne pas être en reste, Mélusine enchaîna rapidement, à la toute suite de Xaël:

"Et moi, Mélusine Mouna Maëwen Myrzam McEwan, prof de Quidditch."

- Quidditch?

Pendant un instant, l'inconnu sembla désarçonné. Cela ne dura pas. Il reprit contenance à une vitesse qui aurait fait croire Mélusine à une hallucination collective. Ca ne pouvait ^pourtant pas être l'effet du jus de citrouille... elle n'avait fait qu'un banal mélange citrouille-gingembre-cannelle.

"Bah oui, Quidditch. Comme le Quidditch quoi. Vous sortez d'où?"

Elle profitait de son très bref avantage, avec la conscience instinctive que cela ne durerait pas. Une loi implicite énonçait de ne pas frapper quelqu’un qui se trouvait déjà à terre. Mais il y avait des individus qu'on préférait ne pas voir se relever. Tout était une question de choix, dans la vie. Et surtout, du moment pendant lequel appliquer ces choix.
Mais elle avait encore été trop lente.
L'intrus la foudroya du regard, et, pour la première fois en vingt années d'existence, elle eut peur que cela ne soit pas qu'une expression. Ce type était la personnification du regard qui tue.

- Bien. Ça suffit., déclara l'individu, sans même y mettre le ton. Pourtant, tout sembla soudain s'éteindre. Plus un bruit, plus un son. Même leur feu parut perdre en substance. Connaissez-vous le sort réservé à ceux qui me font perdre mon temps?

Quelque chose dans sa voix sous-entendait que non, ils n'avaient pas du tout envie de le connaître. Ce même sous-entendu portait un peu plus loin. C'était un "écartez-vous sinon...". Mélusine le connaissait bien, celui-là: elle s'était appliquée à le travailler, depuis son plus jeune âge. Et était dégoûtée que ce type excelle dans ce domaine où, selon les jours, elle oscillait entre le potable et le pitoyable. Il n'y avait pas de justice.
Froussards, ou tout simplement prudents, Emreis s'écarta le premier, rapidement suivi par Patrick. Seule Zyn ne bougea pas. Les menaces, c'était facile. Pour le reste...

"Je demande à voir."

C'était difficile à dire avec les flammes qui teintaient le tout de clair et d'obscur, mais elle crut voir passer sur le visage de l'homme-sans-nom un soupçon de surprise, voire même d'admiration. C'était passager. Il retrouva sa neutralité menaçante et leva les mains vers elle, dans un geste d'une grâce mortelle.